Guerre du Sahara : L’attaque de Touajil /par Mohamed Lemine Ould Taleb Jeddou

23 July, 2020 - 01:43

Après la première attaque, la base de Touajil a été réarticulée et a été confiée au lieutenant Attih, récemment venu de Boulanouar avec la reconstitution de l’escadron statique et la montée en puissance d’un escadron motorisé de 10 Land Rover confié au sous-lieutenant Lebatt Ould Mayouf venant de F’dérick.

La base de Touajil comprend les installations de la Snim et quelques baraques montées par des ouvriers de la SNIM pour loger leurs familles. Tout cet ensemble était ceint par une digue de protection sur les quatre côtés de part et d’autre de la voie ferrée avec deux passages l’un au nord et l’autre au sud. La localité de Touajil est installée sur un glacis de 2 kilomètres sur trois où viennent mourir les langues sablonneuses de l’Azefal dans la direction nord-est/sud-ouest. A deux kilomètres à l’est, la base est surplombée par une falaise dominant le terrain dans toute sa profondeur sud, ouest et nord. Au nord, le guelb d’Areib Lebiadh culmine et constitue un point clé essentiel dans toute manœuvre. L’escadron statique, en plus des armes individuelles G3 et Fal est doté de Mit 30, d’AA 52, de FM 24/29 et était réparti en positions sur la digue de protection avec effort sur les directions nord, ouest et sud. L’escadron motorisé avait deux missions principales: escorter les équipes de la SNIM opérant sur la voie ferrée et intervenir au profit de l’escadron statique. Ayant pour armement majeur quatre Mit 50, quatre mortiers de 81m/m et deux Mit 30, l’escadron était installé de jour sur les hauteurs à l’est de la localité et de nuit, s’intercalait entre les positions statiques pour les renforcer en comblant les intervalles vides entre elles.

 

Un combat à courte distance

 

La journée du 28 Février 1978 était une journée magnifique, avec une température moyenne, sans nuages ni vent, particulièrement favorable à l’observation, aux déploiements tactiques et aux liaisons sur de longues distances. Et providentiellement, l’escadron motorisé ce jour-là  n’était pas en sortie d’escorte.

Vers 17h00, les guetteurs de l’escadron motorisé, à partir de leurs emplacements  sur la falaise décèlent les mouvements de l’ennemi, venant du nord, aux environs d’Areib Lebiadh. Ils appellent la base pour l’informer, mais personne n’était à l’écoute. Le commandant d’escadron motorisé, descendu à la base était sur une 11/13 avec un ouvrier de la SNIM pour la fixation d’une installation de mortiers de 81m/m. Ce n’est qu’à 17 heures 30, après l’explosion du premier obus et le crépitement de la première rafale de l’ennemi que la base se rendra compte de l’attaque.

Profitant de l’angle mort créé par le talus, l’ennemi attaque sur les trois directions Nord-ouest, ouest et sud. Une dizaine de véhicules venant du Nord-ouest effectuent un débarquement sur objectif. Les positions statiques réagirent et le combat s’engagea à courte distance. Sur l’initiative du commandant d’escadron adjoint, l’escadron motorisé descend vers la base et sera pris à partie par une mitrailleuse d’une position statique par méprise, mais continuera son mouvement vers l’intérieur du dispositif sans gros dégâts, pour prendre position au sud de la base. Au même moment, un élément ennemi d’une dizaine de véhicules contourne la base par l’ouest et se dirige vers le sud. Il s’avèrera plus tard que cet élément avait pour mission de saboter la voie ferrée à 7 kilomètres au sud de la base. Après leur mise en batterie, les mortiers 81 entrent en action effectuant des tirs d’aveuglement avec des obus fumigènes et de barrage avec des obus de grande capacité. Après une trentaine de minutes, la combinaison de l’action choc du débarquement sur objectif ennemi et celle de ses armes d’appui composées de B 10, de canons de 75 m/m SR et de bitubes de 23m/m crée l’effet psychologique escompté et les positions statiques les plus au nord perdent pied et s’esquivent vers l’intérieur du dispositif. Pour rompre le déséquilibre tactique, momentanément créé par le repli des positions statiques, un peloton motorisé, initialement en réserve, mène une contre-attaque, repousse l’ennemi, se rétablit sur la digue de protection face au nord et, grâce à sa mobilité, arrive à couvrir un plus grand espace interdisant à l’ennemi l’accès de cette direction. Pendant près de deux heures, un combat féroce rapproché, émaillé d’attaques et de contre-attaques de part et d’autre, oppose la base à l’ennemi. L’arrivée de l’obscurité et la détermination inflexible des combattants de la base imposent à l’ennemi de décrocher. Lorsque ce dernier se replie aux environs de 19h30, les unités de la base ne disposaient que de quatre obus de mortiers 81m/m et deux bandes de 100 cartouches de 12,7m/m. Au cours de l’accrochage deux soldats tomberont sur le champ d’honneur et 10 seront blessés dont deux graves. Ce n’est que vers 22h00 que l’ennemi quittera définitivement la zone de combat. Un sous-groupement de la 2 Région Militaire est dépêché pour tendre une embuscade à 15 kilomètres à l’ouest de Guelb Elmoucha, mais l’ennemi le contournera et sera signalé vers 03h30 aux environs d’Aghzumal.

 

 

Extrait de “La Guerre Sans Histoire