Journée mondiale de la lèpre : le défi est toujours d'actualité, en dépit des avancées

29 January, 2015 - 00:07

Les handicapés de la lèpre ont célébré, le 26 Janvier, au siège de leur association, la 62ème journée internationale qui leur est dédiée sous le slogan : « par le traitement et le travail, nous défions la lèpre ».

Le président de l’AMPHL (Association Mauritanienne de Promotion des personnes Handicapées de la Lèpre) a souligné, dans son allocution, que « l’ère du mépris et de la marginalisation des handicapés de la lèpre est à jamais révolue. Ces derniers jouissent, désormais, du respect et de la confiance de tous, participant activement à l’œuvre de développement ». Ahmedou ould Abdel Kader a salué l’expérience de l’AMPHL dans le domaine de la coopération sociale, rappelant que le labeur, l’assiduité et la patience ont permis de convaincre les partenaires nationaux et étrangers de la sincérité de sa volonté et de la viabilité de son style et de ses programmes. Abordant l’historique de son organisation, le président de l’AMPHL a révélé qu’à sa fondation en 1991, les conditions étaient on ne peut plus difficiles ; cette frange fragile de la société était alors victime de mépris et d’incompréhension. L’association a pu réussir à inverser cette tendance, grâce à la volonté, l’expérience et l’appui d’un nombre croissant de non-lépreux.

Ahmedou s’est aussi montré très satisfait de ce que le traitement de la lèpre soit actuellement disponible et gratuit en Mauritanie, grâce à la fructueuse coopération entre le département de la santé, l’OMS et la fondation Raoul Follereau, rappelant aussi que les handicapés de la lèpre ont dernièrement bénéficié de l’insertion et sont devenus partie prenante dans le développement national. « Il reste à assurer la sécurisation de cette frange fragile  de la société et nous demandons au ministère de la santé de mettre en œuvre la détection systématique de la lèpre et de rendre disponible les médicaments nécessaires, avant qu’on arrive au stade des séquelles graves ». Et de souhaiter que soient intégrées, dans les programmes des écoles nationales de la santé, des méthodologies pédagogiques qui informeront leurs étudiants et stagiaires sur les nouveaux progrès enregistrés, dans le domaine de dépistage et de traitement de la lèpre, d’une part, et formeront, d’autre part, des techniciens spécialisés dans la fabrication et le montage des prothèses indispensables aux handicapés de la lèpre.

 

Elimination de la lèpre comme un problème de santé publique

« De nos jours, plus de cinq millions de personnes (malades et familles) sont victimes, en Afrique, des conséquences sociales et économiques de la lèpre », a estimé le docteur Baptiste Jean-Pierre, représentant de l’OMS en Mauritanie. La mise au point d’un traitement efficace basé sur la combinaison de trois médicaments, la PolyChimioThérapie (PCT), et la gratuité de ce traitement ont conduit à une guérison rapide. Cela a justifié la décision de l’Assemblée mondiale de la Santé, en 1991, dans sa Résolution WHA44.9, d’éliminer la lèpre en tant que problème de santé publique, en se fixant d’atteindre un taux de prévalence inférieur à un cas pour 10 000 habitants. Durant cette dernière décennie, onze millions de personnes, dont plus de 800 000 en Afrique, ont été guéries, avec le PCT, et mènent une vie tout à fait normale. Trente-sept pays ont atteint le seuil fixé pour l’élimination de la lèpre mais trois courent le risque de ne pouvoir y parvenir en 2015. Malgré les progrès accomplis, des défis restent donc à relever. Afin d’y parvenir, les États-membres doivent continuer à soutenir les programmes d’éradication et en faire une priorité. Ils doivent aussi intégrer la surveillance de la lèpre comme celle des autres maladies et mettre les ressources nationales nécessaires à la disposition des programmes.

En Mauritanie, indique le docteur Baptiste, les données du programme national de lutte contre la tuberculose et la lèpre montrent « que la lèpre a été éliminée comme un problème de santé publique et que l’engagement de l’Etat, dans cette lutte, a été déterminant, avec la formation continue du personnel, la mise à disposition de moyens, y compris l’augmentation du budget, l’acquisition des médicaments, la mise au point de programmes de réinsertion sociale des handicapés de la lèpre, la promulgation des directives pour la prise en charge, le suivi des personnes et la distribution des vivres aux nécessiteux ».

Mais, pour remarquable qu’il soit, le travail de l’Etat n’est pas solitaire, relève-t-il, « la lutte contre la lèpre a été un travail collectif multisectoriel, avec la participation des partenaires, de la société civile nationale et internationale, et multidimensionnel, avec le développement des activités dans le domaine sociale, de la sensibilisation, du renforcement des capacités des personnes ». C’est le lieu ici de souligner, dit-il, « cette dimension importante de l’action contre cette maladie. En conjuguant les efforts de tous les acteurs, nous pouvons atteindre nos objectifs rapidement et durablement. Je voudrai aussi souligner le courage des personnes handicapées de la lèpre qui refusent de courber échine et continuent à se battre pour une vie digne ».

Rappelons que cette journée vise à sensibiliser l’ensemble des décideurs, la communauté, les lépreux eux-mêmes, sur la prévention, le dépistage et la prise en charge des malades, afin de lutter contre l’exclusion, la discrimination et la stigmatisation dont ils sont victimes, au sein de leurs propres groupes sociaux et dans les milieux de travail. « Cette lutte s’inscrit », conclut le représentant de l’OMS, « dans les priorités de l’Organisation mondiale de la santé, la Fédération des associations de lutte contre la lèpre dans le Monde, qui visent, pour les trois prochaines années (2015- 2018), les objectifs suivants : stopper la transmission  de la lèpre, prévenir les invalidités et poursuivre la lutte contre l’exclusion, en favorisant la réinsertion sociale ».

 

Thiam Mamadou