Autour d'un thé

5 October, 2017 - 01:21

Tu sais, quand tu regardes bien autour de toi, tu ne vois rien d’autre que de gros amoncellements d’ordures, jetées ici et là. Parfois n’importe où. N’importe comment. Un groupe de sénateurs – qui n’en sont plus, d’ailleurs, selon les derniers amendements mais qui s’entêtent à le rester, quand même – sont ainsi déposés, là, dans un grand parc ordinairement destiné au stationnement des voitures. Ce n’est que chez nous qu’on parque les gens – je veux dire les honorables – juste entre la BCM et feu Sénat, un peu excentré de la porte de la Présidence. Il y a aussi deux voitures de police, pour parer à toute éventualité : un coup d’Etat, une action de sape ou des fous qui essaieraient, sait-on jamais, de foncer tout droit vers le Palais. Les gens parlent. Comme ça. De rien. De tout. Tu ne trouveras pas vraiment quelque chose à « prendre avec la main ». Un peuple plat. Un peuple superficiel. Un peuple simpliste. Une vidéo circule, elle fait le buzz. Hé, c’est bien le Président, assis sur un matelas, manipulant un smartphone, dans une pièce ordinaire. A côté de lui, il ya une femme apparemment très dégourdie. Bon, c’est vrai, ça fait des semaines que ça circule, cette vidéo. Mais, moi, j’y reviens, parce que ça me fâche que tout un peuple se comporte comme ça.  Mais qu’est-ce que ça peut nous faire que le Président ne porte pas de chemise, voire même pas de pantalon ? Ça n’avance ni recule. L’argent,c’est fait pour être dépensé. Que ça aille dans la poche d’un proche ou d’un lointain, ce n’est pas important. On ne mange pas l’argent, on le dépense. Comment ? Aucune importance et c’est ça qui m’énerve. L’essentiel serait qu’il serve à quelque chose. Quatorze milliards pour un Palais des congrès ? On en a déjà un. OK,mais jamais un sans deux et jamais deux sans trois. L’appétit vient en dépensant. Vraiment un peuple idiot ! Vous savez, les écoles vendues, le stade olympique et ses boutiques, l’école de police avec ses immeubles, tout ça, c’est pour qui ? C’est à qui ? Car il faut bien, tout de même, que ça appartienne à quelqu’un. On ne construit pas pour personne. Où vous avez vu ça ? Un peuple coq à l’âne : hé, il faut un plan d’urgence au profit des populations agropastorales ! Hé, Ould Youssouf a été dégagé des locaux des Nations Unies ! Hé, Ould Hademine a reçu trente millions ! Hé, les prisonniers de Bir Moghrein vont être libérés ! Hé, les relations avec le Maroc sont excellentes ! Hé, Sidi Mohamed ould Boubacar va partir à la retraite dans quelques jours ! Hé, le Parquet a refusé de mettre sous les verrous les douze sénateurs cités dans l’affaire Bouamatou ! Bref, tu ne sais plus dans quel pays tu es. Puis il y a la bataille sur l’hymne national. Alors que, moi, s’il m’avait demandé mon avis, j’aurais proposé de paraphraser une belle petite chanson scolaire que tous les Mauritaniens allaient aimer : « Connais-tu mon beau pays/ Qui se mire au clair de lune/Emmuré dans une caserne/On dirait un peloton/Ma baraque parmi les ordures/ me condamne aux maladies/Allah Akbar/Bismillahi Rahmani Rahim ». Certains chantent. D’autres déchantent. Marche de Souza. Marseillaise. Azizette. C’est tout comme. Un hymne, c’est un hymne. Point à la ligne. C’est comme le drapeau : le choix de la rougeur peut être inspiré. Surtout chez nous où un mensonge « rouge » est le plus haut degré de mystification. Rien ne vaut les symboles. Les bandes, les deux bandes, ce n’est pas fortuit. Moi, je suis pour apposer, au moins, quatre bandes rouges au nouveau drapeau : une bande de truands, une bande de putschistes, une bande de trafiquants, une bande de menteurs. Comme ça, nous serons tous sur le drapeau, bien représentés : les hypocrites, les applaudisseurs, les bons et les méchants, les casse-pieds, les empêcheurs de tourner en rond, les nageurs en eaux troubles... Je ne dis pas qu’il n’y a que ça, en Mauritanie. Mais c’est la démocratie : le pouvoir à la majorité, pas à l’opposition. Justement, où elle est l’opposition ? FNDU ? G8 ? Et quoi encore ? Très occupés à s’organiser en comité de soutien à celui-ci ou celui-là : vacances bien méritées. Salut.

Sneiba El Kory