Présidentielle 2019 : Ghazwani, un candidat indépendant ?

7 March, 2019 - 00:51

Le candidat Mohamed ould Cheikh Mohamed Ahmed ould Ghazwani a officialisé sa candidature pour la présidentielle de Juin prochain.  Ce fut au cours d’un grand rassemblement, au stade de la Capitale qui a refusé, du monde, ce 1er Mars. Une manifestation marquée par l’absence du Président Aziz et la présence de la Première dame. Occasion, pour ce général, à la retraite depuis peu, qui eut à occuper plusieurs postes stratégiques, plus de dix ans durant, aux côtés de son alter ego et compagnon de route et d’armes, le président Mohamed ould Abdel Aziz qui entend lui céder son fauteuil, après la présidentielle de 2019, si, bien entendu, les Mauritaniens le suivent, dans le choix de son dauphin, de dévoiler les grandes lignes de son programme.

Dans son discours, le candidat Ghazwani, annoncé candidat de la majorité et du pouvoir, a tenu, cependant à surtout se présenter en candidat du rassemblement. De tous les Mauritaniens, donc, d’où qu’ils viennent et de toutes les chapelles politiques. Certes, il s’est engagé à  poursuivre le processus initié  par celui qu’il pourrait remplacer, mais il entend en corriger les erreurs, renforcer la justice, consolider l’unité nationale, dans un pays où « chacun doit se sentir chez lui ». Les victimes d’injustice seront rétablies dans leur droit, promet-il. Candidat de la « majorité », il a beaucoup insisté sur la  justice sociale et l’égalité des citoyens devant la loi, la lutte contre le chômage, l’accès universel à l’éducation et à la promotion des efforts de chacun.

Déclaration de candidature au demeurant quelque peu inédite. En effet, le général Ghazwani n’a pas été  investi par l’Union Pour la République (UPR), principal parti de la majorité présidentielle. Il était pourtant attendu que le candidat soit intronisé par ce parti, lors de son second congrès ordinaire, initialement prévu en Décembre dernier, avant d’être reporté au 2 Mars. Le temps, pour Ghazwani, de se libérer de l’armée. Mais, à l’arrivée, le compagnon d’Ould Abdel Aziz a changé l’agenda  et les  règles du jeu. Selon des sources fiables, il a préféré ne se faire introniser par aucun parti, y compris donc l’UPR qui s’est résigné à tenir ‘’ternement’ son congrès, au lendemain de la déclaration de candidature de Ghazwani. Un semblant de  congrès qui n’aura pris, comme acte un tant soit peu médiatique, que la démission du président du parti et de ses instances : Bureau exécutif et Conseil National, avant d’entériner la mise en place d’une commission de suivi ou de préparation d’un véritable congrès, après la présidentielle.

Le report de la mise en place des instances de l’UPR  (présidence, BE et CN…)  s’explique, selon un cadre du parti, par la crainte de voir surgir, en plein jour, des divergences sur la représentativité des uns et des autres en ces structures, pouvant porter un coup dangereux à la cohésion du parti et à son soutien au candidat du pouvoir. Les congrès de l’UPR ont toujours été des foires d’empoignes  et de déchirures. Autres signes, le parti est resté très discret, lors de la déclaration de candidature de Ghazwani et celui-ci n’a pas pipé mot sur le parti.

Ajoutons à ces constats, la fracture apparue, au sein des députés de la majorité, suite à une pétition  d’un certain nombre d’entre eux  et les diverses initiatives régionales réclamant, toutes, un troisième mandat pour l’actuel Président. La plaie n’a pas fini de cicatriser et, comme dit le dicton, chat échaudé craint l’eau froide. Face à cette situation quelque peu risquée, le candidat Ghazwani aurait donc décidé de prendre ses distances. Sa présence, lors du Congrès de l’UPR, et les amabilités échangées avec son président  cachent mal le malaise actuel au sein de la majorité. A cet égard, organiser un congrès pour simplement annoncer la démission de ses organes directeurs, en cette période cruciale, laisse perplexe les observateurs. 

Cela dit, la stratégie du général-candidat vise, bien évidemment, surtout à ratisser large, dans tous les camps, majorité, opposition dialoguiste, radicale et Société civile. Et, après avoir tendu la main à tous, lors de son discours, Il semble, déjà, à récolter les premiers fruits de sa démarche.  Quelques  personnalités de l’opposition auraient commencé à rallier son camp.

Aujourd’hui, on attend le départ de Ghazwani du gouvernement et son remplacement. D’autres  membres du gouvernement pourraient en faire de même. Il s’agirait du ministre de la Fonction publique,  porté à  la tête de la commission de l’UPR, du ministre du Pétrole, Abdel Vettah,  secrétaire général dudit parti, de Djinda Ball et d’Amedi Camara appelés à se consacrer pleinement à la préparation du prochain congrès. Ould Abdel Aziz reste, lui, assez discret. Pour ne pas gêner son candidat ? On en est, de fait, à lancer des ballons d’essai, marcher sur les probables plates-bandes du (des ? ) candidat(s) de l’opposition. Plus que jamais, wait and see se fait devise politique mauritanienne…

DL