Propositions pour transformer la Mauritanie : Contribution au débat dans le cadre de la présidentielle 2019/Par Aboubakr Ould Maroini

11 May, 2019 - 04:51

Préambule : De l’urgence d’un débat d’idées, constructif et ouvert

 

Près de soixante ans après son indépendance, la Mauritanie se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins. Dans un contexte mondial au rythme effréné, notre pays, mis sous pression par l’exacerbation des antagonismes, doit redoubler d’effort afin de combler le fossé qui se creuse, jour après jour, avec le reste du monde. Un défi d’autant plus audacieux qu’il concerne tous les domaines de l’agir politique : économique, culturel, social et sociétal…

Aussi, eu égard au contexte national et régional, mais aussi à la profondeur et à la rapidité des évolutions à l’échelle mondiale, les prochaines échéances électorales pourraient s’avérer décisives pour l’avenir de notre pays. La nécessité impérieuse de bien négocier ce tournant historique apparaît alors comme une évidence, ainsi que celle de proposer un projet à la hauteur de ce moment crucial.

 

Au-delà des polémiques peu fécondes entre l’opposition et le pouvoir, les élections de juin prochain doivent donc constituer une opportunité pour intensifier le « débat d’idées » en Mauritanie, tant notre société fait aujourd’hui face à des problématiques et défis qui, de par leur complexité et leur ampleur, nécessitent d'être débattues sur le fond.

Aussi, l’objectif de redéfinir ensemble et réactiver un projet de société digne de ce nom, ne peut être atteint qu’au travers d’un débat profond, structuré et ouvert qui ne se contentera pas des généralités ou des grandes lignes, mais se déclinera, à contrario, jusqu’aux mesures précises et concrètes.

 

Des stratégies ayant vocation à répondre aux défis du développement économique et social[1] ont certes été élaborées ces dernières années, sous l’impulsion des bailleurs de fond internationaux et des politiques publiques censées mettre en œuvre ces stratégies, ont successivement été conduites, mais force est de constater que les premiers intéressés ne s’y retrouvent pas tout à fait.

En effet, dans un contexte où démographie galopante et urbanisation accélérée induisent une inflation croissante des besoins, les préoccupations immédiates et les besoins les plus fondamentaux des citoyens demeurent en grande partie non satisfaits, alimentant un vif sentiment d’indifférence, mais aussi un sentiment d’injustice.

Le renouveau et la consolidation du contrat social appellent donc aujourd’hui des efforts inédits pour la conception et l’implémentation de solutions authentiques, efficientes et adaptées au contexte national pour pallier les dysfonctionnements, en particulier ceux affectant la cohésion sociale.

Ces solutions ne peuvent être envisagées dans la précipitation mais doivent à contrario, résulter d'une réflexion collective et d'un débat d'idées représentant, dans toute leur diversité, les intérêts et les opinions des différentes sensibilités dans notre paysafin de converger ensuite vers une vision stratégique commune centrée sur les grandes priorités et sur le long terme. En revanche, ces solutions doivent être anticipées et renforcées par un plan d’urgence vigoureux pour affronter la pauvreté et sortir rapidement de l’état de crise.

 

Dans cet esprit, l’on ne peut que formuler le vœu d’une campagne électorale digne et de haut niveau, où chacun résiste à la tentation des coups bas et des attaques personnelles Une campagne où les candidats et leurs conseillers se prêtent volontiers à un « débat d'idées » devenu une urgence pour notre pays et dont l’ambition est multiple : insuffler un nouvel espoir en Mauritanie, susciter l’engagement du plus grand nombre de nos concitoyens et mobiliser leurs énergies afin d’ouvrir à notre peuple, et en particulier aux jeunes générations, des perspectives nouvelles.

  C’est à ce débat-là que je souhaite aujourd’hui contribuer en partageant mes propositions dans chacun des domaines clés que sont l’Education, la justice, la santé, l’emploi et la jeunesse, l’économie, la justice sociale et la répartition des richesses, ainsi que la qualité des institutions et la moralisation de la vie politique.

 

L’enjeu va bien sûr au-delà des élections prochaines et quelle que soit l’issue de celles-ci, le débat d’idées devra se poursuivre et même s’intensifier pour que chacun puisse apporter, de la manière la plus constructive, sa contribution au succès de notre pays dans la période qui s’ouvre.

 

 

I)     Éducation :  Lancer une mobilisation Nationale pour le sauvetage de l’Ecole publique

 

Le système éducatif est littéralement sinistré. Sa performance extrêmement médiocre, se traduit par des niveaux excessifs de déperdition scolaire, aussi bien dans le primaire que dans le secondaire (à peine 30% des élèves scolarisés d’une génération atteignent finalement la dernière année du lycée, et à peine 10% des candidats réussissent l’examen du baccalauréat, soit en définitive un taux de 3% de bacheliers de la dite-génération).

Les politiques restent axées sur des objectifs quantitatifs de scolarisation d’une classe d’âge au primaire, au détriment du qualitatif.

L’école peine à remplir la mission d’une véritable école républicaine qui forme tous les enfants de manière uniforme, en leur transmettant l’ensemble des connaissances et compétences nécessaires pour faire d’eux des adultes conscients, responsables, porteurs des valeurs et animés du sens civique. De fait, elle peut difficilement matérialiser sa vocation théorique d’un creuset national censé consacrer l’égalité citoyenne et l’adhésion à la Nation.

Cependant, l’intelligence et la soif d’apprendre de notre jeunesse ainsi que la prise de conscience des familles quant à l’importance de l’éducation des enfants, seule à même de réduire les fortes inégalités entre les couches sociales et, à terme, les éliminer, laisse entrevoir les prémisses d’une école nouvelle exigée par l’ensemble des Mauritaniens.

Dans cette perspective, une mobilisation Nationale pour le sauvetage de l’Ecole publique est nécessaire et devra être précédée d’un état des lieux approfondi, d’une durée maximale de trois mois afin de réaliser une évaluation fine (au-delà du diagnostic global qui reste trivial) :

i)       évaluation de la situation actuelle des moyens (infrastructures, outils pédagogiques et ressources humaines)

ii)     analyse des sources de dysfonctionnement sur les plans administratif, humain, matériel et pédagogique.

iii)    Bilan des compétences et des capacités des enseignants en service afin de réévaluer le niveau du corps enseignant.

 

Puis, cette mobilisation, qui devra unir les efforts de tous les acteurs concernés, s’articulera autour des 10 grandes initiatives suivantes : 

1.     Eriger l’urgence scolaire au rang de « Cause Nationale d’Urgence 2020-2030 », et procéder à la création d’un fond pour le financement des infrastructures et des moyens de l’Education, doté d’un conseil de surveillance indépendant à la probité irréprochable. Ce fond sera alimenté à partir

-        d’une vaste campagne nationale de collecte de dons

-        d’une contribution annuelle du fond national des hydrocarbures -FNRH (disons 15% des recettes annuelles du FNRH, à partir de 2022 date des premières exportations de gaz - LNG, et ce, en dehors du budget habituel de l’Etat, le FNRH ayant la vocation d’un « fond pour les générations futures »)

-        également, la possibilité d’un impôt exceptionnel sur les entreprises pourra être envisagée si nécessaire (impôt temporaire sur la période 2020-2022, avant le début d’exportation du LNG)

 

2.     Renforcer les effectifs de l’Education par l’instauration d’un service civique obligatoire des nouveaux diplômés (22-28 ans), et ce de 2020 à 2030 :

-        c« service civique » durera un an dont un trimestre consacré à une formation accélérée sous la forme d’un stage intensif encadré par des experts de l’Education (la logistique des appelés étant à assurer par l’armée nationale). Les jeunes réquisitionnés seront ensuite mis à disposition de l’Education nationale pour être affectés, selon leur profil et leur appréciation de fin de stage, en école primaire ou en collège.

-        Cettcampagne de service civique bénéficiera de l’accompagnement financier nécessaire, en particulier par le maintien des rémunérations des jeunes réquisitionnés (qu’ils soient salariés du public ou du privé) ainsi que la mise en place d’allocations pour ceux qui sont demandeurs d’emploi.

 

3.     Réformer les programmes. Il apparait urgent de réformer les programmes et les approches pédagogiques, à la lumière des objectifs d’acquisition et d’apprentissage assignés à chaque niveau scolaire.

Il convient, en particulier, de mettre fin à la dualité que connaît actuellement le système éducatif et unifier, enfin, l’Ecole Dans le même temps, les dispositifs de formation des enseignants, eux-mêmes, doivent être revus de fond en comble afin de mettre fin à l’improvisation et permettre aux enseignants de disposer véritablement des compétences nécessaires pour prodiguer, à leur tour, des enseignements de qualité et en bonne adéquation avec les besoins du pays en ressources humaines. Dans cette optique :

o   Il faudra solliciter des experts internationaux. Le concours de conseillers légitimes et compétents (au moins 3 experts), permettra de soutenir les ministères en charge de l’enseignement dans la mise au point et le pilotage des réformes souhaitées, en adéquation avec les objectifs de l’Education et des politiques définies au niveau national.

o   Des innovations pédagogiques seront progressivement introduites. Pour ce faire, l’expertise Mauritanienne appuyée, si nécessaire, par des spécialistes étrangers devra réfléchir sur l’évolution des programmes et des méthodes d’enseignement. Après une analyse des innovations probantes en matière de pédagogie et une expérimentation à échelle réduite, des méthodes modernes pourront être introduites sous l’égide d’experts, à l’instar de la Méthode de Singapour en Mathématique. Pour combler le gap qui se tient devant nous, l’utilisation des outils numériques s’avère indispensable.

 

4.     Renforcer les capacités des Institutions pédagogiques. En ce qui concerne les institutions telles que l’Ecole normale Supérieure, l’Institut Pédagogique National et les instituts de formations de maitres, une campagne d’évaluation de leurs capacités sera menée suivie d’une réorganisation en même temps que la mise à disposition de ressources humaines et pédagogiques. Le recrutement de professeurs et d’inspecteurs supplémentaires pourra également être effectué à l’étranger pour une période transitoire. La mise à contribution des professeurs et enseignants universitaires pourra également être considérée (en fonction de leurs profils respectifs).

 

5.     Valoriser la fonction d’enseignant. Il convient d’allouer les moyens nécessaires à l’amélioration des conditions matérielles du corps enseignant afin de leur permettre d’accomplir leur mission dans de meilleures conditions, notamment grâce à un salaire décent et à l’adoption d’un système de motivation efficace, incluant l’attribution de primes de résultats aux enseignants qui performent le mieux. Cette valorisation passera aussi nécessairement par un tri exigeant et un renforcement de la formation professionnelle qui sera complétée par l’organisation de séminaires et stages périodiques afin de perfectionner de façon continue les compétences des enseignants, tout en développant le sens de responsabilité, la passion du métier et l’éthique professionnelle.

 

6.     Lutter dans le même temps contre l’absentéisme des enseignants en renforçant les contrôles et instaurant des sanctions dissuasives à même d’endiguer ce fléau.

Pour ce faire, il est nécessaire de réactiver le rôle des instances de supervision et de contrôle avec une volonté résolue de mettre fin au « laisser aller » et de rétablir un véritable climat d’ordre et de sérieux dans les établissements scolaires.  Il faudra également impliquer les associations de parents d’élèves et leur permettre de jouer un véritable rôle, y compris en mettant à profit leur vigilance face aux dysfonctionnements qu’ils pourraient relever.

7.     Rattraper le retard au niveau des infrastructures scolaires (que ce soit en termes de construction ou de remise à niveau et entretien) et résoudre le problème de congestion et surpopulation des classes. Il faudra, en particulier, interdire, avec effet immédiat, les classes de plus de 55 élèves dans le primaire et viser, à terme, des classes au primaire et au collège d’environ 35 élèves en moyenne.

 

8.     Développer une véritable complémentarité entre l’Ecole privée et l’Ecole publique plutôt que de « laisser faire » la concurrence déloyale qui se traduit par l’engagement illégal des professeurs du public par les établissements privés exacerbant ainsi le phénomène de l’absentéisme.

Nous pourrons ainsi tolérer le maintien d’une offre privée tout en mettant fin à l’anarchie dans le secteur et en exigeant un respect scrupuleux des programmes tout comme les règles et les normes de qualité.

 

9.     Assurer un accès généralisé à l’éducation

·par la suppression, à terme, du concours d’entrée au Collège et par la scolarisation effective obligatoire jusqu’à l’âge de 16 ans.

·la mise en place d’une bourse scolaire pour les jeunes filles issues de milieux modestes entre 14 et 18 ans. Cette mesure favorisera l’accès à l’éducation pour les jeunes filles, et permettra, par conséquent, d’enrayer le mariage précoce.

 

10.  Lutter contre la malnutrition des écoliers : afin d’assurer de meilleures conditions d’apprentissage, notamment par la distribution d’une collation généralisée aux enfants du primaire, composée d’un produit laitier et d’un apport en fibres et en vitamines, tout en privilégiant les denrées produites localement. 

 

 

II) Justice : « Reformer et garantir une véritable indépendance de la justice »

 

La situation de la justice de notre pays n’a évolué que très lentement au cours des dernières années. Certes des initiatives ont vu le jour, comme l’amélioration de la rémunération des juges et des personnels judiciaires, l’enrichissement de l’arsenal législatif afin de favoriser un meilleur accès à la justice, l’amélioration des textes et procédures en matière de droit commercial et le renforcement de l’arsenal de lutte contre l’esclavage et la torture.

Mais le renouveau de notre système judiciaire n’en est qu’à ses balbutiements. Traffic d’influence et corruption restent monnaie courante, et l’exigence d’indépendance et d’impartialité de la justice est à ce jour peu satisfaite.

En effet, la mainmise de l’exécutif reste tangible. J’en veux pour preuve le peu de transparence des mutations, des promotions et des sanctions de magistrats ainsi que la faiblesse notoire de la justice Mauritanienne face aux privilégiés et aux détenteurs de pouvoir.

Qu’elle s’explique par un manque de moyens, ou par l’intervention ou l’immobilisme de certains appareils de l’exécutif, la négligence quant à l’application des décisions de justice est inacceptable. Les compétences et le degré de spécialisation de certains magistrats, ainsi que leur indépendance posent aujourd’hui légitimement question à nos concitoyens. Quant à l’inspection de la justice, elle reste peu convaincante, qu’il s’agisse du plan quantitatif (fréquence des inspections) ou qualitatif (dans l’accomplissement des missions).

 

Pour toutes ces raisons, il apparait urgent d’organiser des « Etats généraux de la Justice » réunissant experts, représentants du corps judiciaire et société civile, afin de réunir un consensus, au-delà du diagnostic, sur les chantiers prioritaires pour réformer la justice.

Les propositions qui en seront issues devront servir de base pour améliorer le système judiciaire, renforcer son indépendance tout en l’inscrivant dans une marche résolue vers l’instauration de l’Etat de droit en Mauritanie.

 

En préalable à ces états généraux, il m’apparait important de soulever les cinq thématiques suivantes (toutes dictées par le bon sens et par les enseignements de notre sainte religion) :

 

1)    Garantir l’accès de tous à la justice, en particulier aux plus vulnérables, de manière à permettre une véritable protection des droits de tous les citoyens. Dans cette optique, les procédures (pénale et civile) doivent être simplifiées en visant l’amélioration de l’efficacité et de la performance, et, surtout, l’application plus systématique des décisions de justice.

2)    L’indépendance et l’impartialité de la justice doivent être sacralisées en tant que principes fondamentaux. Cette cause nécessite la mise en place d’une réelle protection des juges vis à vis des pressions de l’exécutif et de veiller à la non annexion du champ judiciaire par les politiques ou tout autre pouvoir (militaire, financier, ethno-tribal, etc.)

3)    Renforcer l’inspection de la justice pour en faire un dispositif crédible et fiable, à même de nous assurer une conduite des juges conforme à l’éthique et à la déontologie. Pour ce faire, la matérialisation d’un régime de sanction des magistrats, reconnus responsables de manquements ou de dysfonctionnement est indispensable. En cas de corruption avérée, la sanction devra aller jusqu’à la radiation.

4)    Réformer la formation des jeunes magistrats afin de leur inculquer une forte déontologie professionnelle centrée sur les valeurs d’intégrité, d’impartialité et d’équité, ainsi que les qualités d’indépendance du juge et son attachement total et inconditionnel à la loi, tel que dicté par nos valeurs et notre religion. Une telle déontologie sera renforcée au travers de stages pratiques orientés notamment vers la valorisation d’une symbolique inviolable, et sera également transmise dans le cadre de campagnes régulières de formation continue.

5)    La constitution d’un corps judiciaire légitime, indépendant et compétent.

o      Afin de consacrer l’indépendance de l’appareil judiciaire, une proposition de réforme en profondeur consisterait à transformer en mandats électifs les postes de présidence des juridictions importantes (Conseil constitutionnel, Cour suprême, Cours d’appel, Cour des comptes), de même que les procureurs de la République.

o      Pour être éligible à l’un de ces postes, le magistrat doit avoir de véritables mérites (compétences et expérience avérée, probité reconnue et adhésion éprouvée aux principes d’indépendance, d’impartialité et sens aigu de la déontologie de la profession).  Le collège électoral pourrait être formé de grands électeurs, composé de représentants des composantes de la société : élus locaux, représentants de la société civile, syndicats et magistrats.

 

 

 

 

III)  Jeunesse : « Mettre en place un programme efficient et durable d’insertion de la jeunesse »

 

Près de 60% de la population mauritanienne est aujourd’hui âgée de moins de 20 ans et, selon des chiffres de 2014, les jeunes de 15 à 24 ans représentent près de 40 % de la population.

 

Ce profil démographique devrait constituer a priori un atout pour notre pays et pour son potentiel de développement futur. Mais cet avantage est aussi un véritable challenge, tant la reproduction des inégalités et l’insertion des jeunes, touchés de plein fouet pas le chômage de masse, sont autant de difficultés à surmonter. Ainsi, pour tirer profit de notre atout démographique, des solutions pertinentes restent à concevoir.

Pourtant, si de nombreux experts s’accordent à dire qu’en Mauritanie, la réduction de la pauvreté et l’emploi des jeunes sont étroitement liés, l’action politique en la matière laisse à désirer. Cet immobilisme est d’autant plus néfaste qu’il génère une exclusion sociale exacerbée et accentue le désarroi de la jeunesse.

 

Or, sans une politique proactive de redistribution des richesses et de lutte efficace contre l’exclusion des jeunes en assurant un accès de tous aux mêmes opportunités, il sera pratiquement impossible de briser le cercle vicieux de la transmission intergénérationnelle de la pauvreté et de renforcer l’inclusion sociale en Mauritanie.

 

Certes, un haut conseil de la jeunesse (HCJ) a été créé, mais sa mission mérite d’être revue et son rôle redéfini : cette institution devrait mieux être utilisée pour comprendre et intégrer les aspirations des jeunes et favoriser, par conséquent, leur contribution au processus de construction nationale (plutôt que de l’utiliser comme un instrument de récupération politique ayant vocation à contenir les mouvements de la jeunesse).

 

Notre proposition de « mettre en place un programme efficient et durable d’insertion de la jeunesse » s’articulera en trois grandes priorités:

 

1)     Créer des « gisements » durables d’emplois et faciliter l’accès des jeunes à de nouveaux emplois productifs et de qualité, avec comme objectif : la création de 10 000 nouveaux emplois par an. Pour cela, tous les gisements doivent être mis à contribution :

 

-       Dans le secteur public : lancer un programme volontariste s’appuyant sur une politique de relance par les travaux d’infrastructures (infrastructures de santé, d’éducation, routes, ouvrages côtiers et autres travaux publics)

 

-       Encadrer et accompagner l’investissement dans les secteurs porteurs (hydrocarbures, mines, pèche, agriculture, etc.) en favorisant un véritable « contenu national » qui contribuera à une maîtrise progressive de la chaîne de valeur économique de chacun de ces secteurs.

-       Mettre en place des mesures pour inciter les entreprises privées à embaucher et à se développer (comme abordé dans la section économique)

2)     Instaurer un service civique obligatoire pour une tranche d’âge (22 à 28 ans, dans un premier temps axé sur l’éducation, et étendu dans un second temps aux autres secteurs : protection civile et secourisme, défense & sécurité, santé/prévention, appui à l’agriculture/élevage/pêche, etc.)

3)     Mise en place d’un « Revenu Universel d’Activité » pour les jeunes (24-35 ans) en phase de construction d’un projet professionnel ou de création d’activité : Plateforme « AdelChi » (= plateforme à mettre en place, permettant à chaque jeune de se positionner pour se former et « réaliser quelque chose ») A titre d’exemple :

-       Formation à des métiers manuels et création d’ateliers de toute nature appuyés par des coachs expérimentés (Mauritaniens et étrangers): menuiserie, chaudronnerie,  réparation électromécanique & électronique, montage d’appareils électroniques…

-       Fructifier le potentiel de nos jeunes diplômés, et les accompagner pour entrer dans la « knowledge economy »

o   Encourager les initiatives de toutes sortes pour créer et accompagner des startup, notamment dans les nouvelles technologies ; encourager et exploiter les compétences de la jeunesse en créant des pôles de développement informatique low cost (offshoring)

o   Création de contenus éducatifs : A titre d’exemple, il y a en Mauritanie une forte présence de la poésie et de la culture orale. Impliquons-nous, auprès des jeunes, en particulier de formation littéraire, dans la valorisation et le développement des talents artistiques, qu’il s’agisse de théâtre, d’écriture créative, de scenarii de films, de poésie etc. La création d’une structure apte à encadrer et à valoriser cette production artistique nationale permettrait à la Mauritanie de se saisir d’une part de marché dans le secteur de la culture et du divertissement et rayonner ainsi dans la sous-région et au-delà.

 

 

La version complète de cette contribution au débat, transmise aux principaux candidats à la présidentielle aborde les sections suivantes :

 

 

Préambule

« De l’urgence d’un débat d’idées, constructif et ouvert»

 

I) Propositions pour l’Éducation

 « Lancer une mobilisation Nationale pour le sauvetage de l’Ecole publique »

 

II) Propositions pour la Justice 

 « Reformer et garantir une véritable indépendance de la justice »

 

III)  Propositions pour la Jeunesse 

« Mettre en place un programme efficient et durable d’insertion de la jeunesse »

IV) Propositions pour la Justice Sociale

« Prendre conscience de l’ampleur de la fracture sociale et lancer un programme vigoureux de réduction des inégalités »

 

V) Propositions pour la Santé 

 « Assurer à l’horizon 2025 une véritable couverture de santé universelle et un accès de tous à des soins de qualité »

 

VI) Propositions pour le Développement économique

« Concevoir et implémenter une stratégie authentique de développement et de diversification de l’économie »

 

VII) Propositions pour le secteur des Hydrocarbures 

« Elaborer et mettre en œuvre une véritable politique nationale des Hydrocarbures »

 

VIII) Qualité des Institutions 

« Actionner cinq grands leviers pour améliorer la qualité des institutions et moraliser la vie publique »

 

 

 

 

 

 

 

[1] notamment celles du Cadre Stratégique de Lutte Contre la Pauvreté « CSLP 2011 - 2015 » puis de la « Stratégie de Croissance Accélérée et de Prospérité Partagée « SCAPP 2016 - 2030»