Autour d’un thé : Déconnexion

4 July, 2019 - 01:51

Quand elle atteint sa limite, toute chose finit. C’est comme ça : qui patiente sera atteint par l’ombre. Il faut savoir attendre, votre tour viendra. Et puis, nous ne sommes pas nombreux en Mauritanie. Chacun peut devenir, un jour, président élu ou candidat malheureux. Entre 2009 et aujourd’hui, c’est quoi ? Pas très longtemps. Une décennie. Et, comme l’a souligné l’encore président qui deviendra, dans quelques semaines, l’ancien président, plus que dix ans, c’est onze. Vous avez toujours tendance, a rappelé l’encore président qui deviendra, dans quelques semaines, l’ancien président, de ne pas décompter l’année du coup d’Etat. Décompter est un terme spécifique de la comptabilité militaire : il ya les décompteurs, les comptables, les payeurs. Ould Ghazwani, c’est CDD : C’est Déjà Demain. Ould Abdel Aziz, CDH : C’est Déjà Hier. Ajib, comme la mort est proche de la vie ! Un adage arabe dit qu’il faut aimer son ami modérément, au cas  où tu te retrouves dans la perspective de le haïr, un certain jour ; et haïr ton ennemi modérément, au cas  où tu te retrouves à l’aimer, un certain jour. Déjà trop nostalgiques de la Rectification, du président des pauvres, du troisième mandat et de la lutte contre la gabegie ? Comme quoi celui qui creuse un puits pour son frère risque fort de tomber dedans. Alors, autant ne pas trop l’approfondir. Il n’ya que le ministère de l’Intérieur et de la décentralisation, et son gouvernement, qui ne savaient pas que, pour maîtriser un peuple, il faut le déconnecter : comme ça, personne n’entend plus personne. Personne ne parle plus à personne. La connexion, c’est la vie, en ces temps nouveaux de la mondialisation via Internet, Whatsapp, Facebook, Messenger, Twitter, Linkedln, Viadeo, Instagram, Snapchat, Myspace. Surtout que le gouvernement est rapide et déjà dans la pente. Alors, comme disait l’ancien porte-parole (Ndeyssan), la vie n’est rien : la stabilité d’abord, avant Internet ; Reporters sans frontières ou Reporters avec frontières : on s’en fout ! Oui, vraiment, on s’en fout ! La preuve. Alors, à quelque chose malheur est bon. Dix jours sans connexion. Complètement déconnectés. Mais on n’en est pas mort ! Finalement, ce n’est pas grave d’être déconnecté. C’est même bien. Congé forcé pour les professionnels et les mordus des petits messages, les petits coucous je suis là, les petits spots et postings. Il ya longtemps que les journalistes ont oublié l’article II. Mais la censure numérique, ça existe. Hein ? Quoi ? Restriction des libertés ? De quelle liberté d’expression parlez-vous ? On ne va pas vous laisser nous faire comme ce que les gilets jaunes ont fait en France. Déconnexion égale paix sociale et stabilité. Surtout que, chez nous, c’est tout le monde qui se connecte, pour menacer l’après élection présidentielle. Les un peu nationaux du Cinquième et du Sixième arrondissement et les étrangers. Ce n’est pas pour rien que le ministre des Affaires étrangères et de la coopération s’est plaint, comme un petit écolier, aux ambassadeurs de certains pays amis : Messieurs, je me plains de vos gens qui « rentrent leur tête dans des choses qui ne les concernent pas » ; qu’ils nous laissent entre nous ! Un jour pour toi et un jour sur toi. C’est un peu comme ça. La dernière présidentielle l’a démontré. Les culbutages, les appels à répondre de ses actes, les démissions du gouvernement. Un vrai mélange. Quelque chose du passé et quelque chose du présent. La thèse du complot contre le pays. Demain, ce sera demain. Un match de football (CAN, Copa América, Coupe du Monde féminine) se joue jusqu’à la fin du temps réglementaire et même au-delà, jusqu’à la fin du temps additionnel. Un match de foot, c’est comme un mandat électoral. Le président, c’est comme l’arbitre. Il sanctionne par carton jaune ou rouge. Un mois de fin de règne, c’est, comme disent les supporters, la fin de zone, pour voir le match sur écran géant. Ça conseille les ministres. Ça prend encore des décrets présidentiels. Ça ordonne les arrestations et les oriente. Un président, c’est aller jusqu’au bout de ses… peines. Même si tout nouveau, tout beau, n’a qu’à se taire jusqu’à investiture… sinon, attention !

Sneiba El Kory