En feuilletant les anciens numéros de Mauritanie Nouvelle, on retrouve ce billet de 1963 intitulé « La philatélie en Mauritanie ». On y découvre avec émotion la vigueur d’un service postal qui, au-delà de sa mission technique, avait compris que le timbre pouvait devenir un miroir du pays et un ambassadeur silencieux de son identité.
À l’époque, l’Office des Postes et Télécommunications multipliait les initiatives pour produire des figurines postales d’une grande qualité artistique. Chaque timbre portait un fragment de la Mauritanie nouvelle : ses paysages, ses traditions, ses espoirs.

Les premières séries : quand la faune racontait la République
Après une première série consacrée aux activités traditionnelles, une collection entière fut dédiée aux animaux du pays. Girafe, guépard, hyène, babouin, oryx, dromadaire, gazelle dorcas, outarde, phacochère, autruche… autant de symboles d’un territoire à la fois sauvage et noble, sublimés par la gravure.
Puis vint, le 7 septembre 1963, une série de seize timbres-taxe consacrés aux oiseaux de Mauritanie, saluée pour sa beauté et sa finesse. Ces émissions n’étaient pas de simples moyens d’affranchissement : elles incarnaient la fierté d’un peuple qui voulait se faire connaître par l’art, la nature et la culture.

Un art au service de la diplomatie culturelle
Les concepteurs de ces timbres comprirent vite leur valeur symbolique : chaque émission philatélique devenait une carte de visite internationale.
Certains timbres furent ainsi associés à des événements mondiaux : Déclaration universelle des droits de l’homme, développement des télécommunications, satellites Telstar et météorologiques, coopération Nouakchott–Washington, etc.
La philatélie fut alors un vecteur de diplomatie douce, illustrant la modernité d’une Mauritanie en pleine affirmation sur la scène mondiale.

Et aujourd’hui ? Le service philatélique en sommeil
Plus de soixante ans plus tard, la philatélie nationale semble en veille.
Les bureaux de poste disposent de plus de moyens qu’à l’époque, mais la mission culturelle s’est effacée derrière la logique administrative et commerciale.
Le courrier électronique a remplacé le pli manuscrit, et les timbres — jadis ambassadeurs d’une identité — ne font plus l’objet d’aucun programme structuré.
Il n’existe plus de calendrier thématique annuel, ni de séries commémoratives consacrées à nos villes anciennes, à nos manuscrits, à nos artisans, à nos savants ou à nos diplomates. La poste mauritanienne, jadis pionnière en Afrique de l’Ouest par la richesse de ses émissions, semble avoir oublié son rôle de gardienne de la mémoire miniature.
 

Relancer la philatélie, c’est raviver la mémoire
Pourtant, le timbre reste un outil de transmission incomparable.
        •       Il raconte la faune, les paysages, les coutumes, les architectures, les visages et les dates.
        •       Il sert d’outil pédagogique et identitaire pour les écoles.
        •       Il participe au rayonnement culturel et touristique du pays.
        •       Il constitue une archive graphique précieuse pour les chercheurs et collectionneurs.
Redonner vie à la philatélie, c’est redonner une voix à l’histoire.
Chaque nouvelle série pourrait honorer un lieu patrimonial, une figure culturelle, une commémoration nationale, une coopération internationale, ou encore célébrer les artisans, les manuscrits, et les bibliothèques du désert.
 

Un appel à la renaissance du timbre mauritanien
“Un timbre, c’est une mémoire qui voyage. Il porte le nom du pays sur toutes les enveloppes du monde et rappelle que la beauté, elle aussi, peut être une politique publique.” À l’heure où la Mauritanie cherche à renforcer son image culturelle et touristique, relancer le service philatélique serait un geste à la fois symbolique et stratégique : un acte de mémoire, un hommage à l’histoire postale, et un moyen de raconter le pays autrement — par l’image et la couleur.
 

Ahmed Mahmoud Mohamed dit Jemal