Hommage à Mamadou Hamady Sy

27 October, 2025 - 14:28

Mamadou Hamady Sy, dit « Doyen » pour ses compagnons, « Gouv » pour les plus proches, s’est éteint tout en discrétion, à l’aube d’un 15 octobre comme celui-ci, exactement comme il avait vécu : humblement, presque dans l’anonymat. Il laisse derrière lui le silence noble des âmes justes et l’éclat feutré des cœurs fidèles. Instituteur de formation, militant de conviction, il fut de ces rares hommes qui inscrivent leur nom dans l’histoire sans en rechercher ni les fastes ni les lauriers.

Dès les années cinquante, animé par une flamme patriotique inextinguible, il s’engagea aux côtés des “rêveurs” d’une Mauritanie libre et unie. Son nom, discret aux oreilles du grand public, résonna pourtant tant de fois avec force au sein des cénacles où se forge le destin des peuples.

Militant des premières heures du Mouvement National Démocratique (MND), il embrassa avec ferveur les grandes causes : l’unité nationale, l’éveil et l’émancipation des masses, l’indépendance nationale authentique. Il fut de tous les combats, non par ambition, mais par devoir. Son humilité, son aversion pour le faste et les honneurs faciles, définissaient l’essence même de son être. Pour comprendre cet homme, il fallait l’approcher, cheminer à ses côtés, partager ses silences et ses combats.

Deux instants marquants, gravés dans ma mémoire, illustrent sa stature. Au cours de ma carrière, j’ai rencontré des administrateurs civils qui furent ses collaborateurs lorsqu’il gouvernait le Hodh Gharbi et l’Inchiri. Ils gardent en souvenir sa rigueur bienveillante, son art de l’administration, élevé à la dignité d’une discipline presque poétique : phrases courtes, claires, précises ; directives limpides, décisions inébranlables. En tournée, il était maître dans l’art de l’écoute et virtuose de la bienséance : impartial, objectif, toujours guidé par l’intérêt général. Une leçon magistrale d’humanité et de gouvernance, celle qu’aucune ENA ne prodigue.

Plus tard, lors de la préparation de la célèbre « Lettre ouverte des 50 », Doyen dévoila pleinement son art. Aux côtés de son ami Mohamed Aly Cherif (qu’Allah le préserve), il sut conjuguer fermeté des convictions et élégance du compromis. Concessions stylistiques et engagement sur le fond : que la vérité fût dite, que les crimes fussent nommés, que l’espoir fût ouvert. Après la publication de ce manifeste, il œuvra dans l’ombre à bâtir des ponts, à tisser des liens entre générations, aux côtés de grandes figures telles que feu Diawara Gagny, feu Kane Hamidou Baba (qu’Allah les enveloppe de sa miséricorde), Me Diabira Maroufa ou encore Dr Dia Alhousseynou (qu’Allah leur accorde longue vie).

Si je devais retenir une seule image de lui, ce serait assurément celle d’un sage : courtois, humble, intègre, toujours souriant à l’écoute, éternel messager du consensus. Toute sa vie, il fut un pont transgénérationnel, un soldat discret mais essentiel, un conciliateur né, jusque-et-y-compris entre la sobriété et l’élégance vestimentaires.

Je couche ces lignes pour honorer une dette, celle que ma génération a contractée envers ces hommes qui servirent la Nation sans jamais servir leur gloire. Mamadou Hamady Sy fut de ceux-là, un modèle dont la lumière, même dans l’oubli, continue de briller.

Repose en paix, Doyen. Tu as amplement mérité le sommeil des justes. Qu’Allah, Le Tout-Miséricordieux, dans son infinie bonté, te couvre de sa Grâce et t’accorde les plus hauts degrés de Son céleste Paradis.

Birane Hamath Wane

Nouakchott, le 15 octobre 2025