Quelques questions d’actualité : Des manifestations inopportunes et inappropriées

13 November, 2025 - 15:04

Manifestation contre la corruption, manifestation d’anciens militaires

Peut-on combattre la corruption par les corrompus?!
Le malheur de ce pays réside dans une ceinture d’opportunistes sans vergogne qui ne cesse de se renouveler, collant à chaque régime en place depuis Coppolani jusqu’à nos jours. Issus pour la plupart d’entre eux de familles habituées au-devant social ou d’autres « parvenues », parvenues à émerger dans l’échelle sociale depuis l’indépendance du pays jusqu’à nos jours.
Avec le temps, ils avaient appris, toujours à temps, à s’accrocher aux occasions qui se présentent. Ils scrutent le tempérament du régime en place pour s’accommoder à ce qui lui semble plaire.
Il y a quelques deux semaines, le gouvernement mauritanien lança une campagne qu’il présente comme anti-corruption. Une bonne vingtaine de hauts fonctionnaires furent cités et accusés de corruption suite à un rapport de la Cour des comptes. Ceux qui parmi eux étaient en service sont aussitôt limogés, puis remplacés par d’autres dont la propreté reste à prouver.
Sautant sur l’occasion, un attroupement de visages bien connus apparu sur les réseaux sociaux. Parmi les présents, plusieurs anciens ministres et hauts responsables du pays, ainsi qu’un grand nombre de hauts fonctionnaires encore en exercice. Parmi les premiers et les seconds, figurent plusieurs anciens corrompus notoires. Comme d’habitude ils s’arrangent toujours pour se positionner les premiers devant les caméras.
Qui est derrière cette initiative apparemment bien orchestrée par des professionnels de ce genre d’occasions à ne pas manquer? Peut-être qu’on ne saura jamais. De même qu’on ne saura jamais les raisons de la participation de certaines honorables personnalités plutôt connues pour leurs bonnes images aux yeux de l’opinion. Personnalités connues aussi pour leur intelligence, ils auraient pu éviter de s’afficher à côté de pestiférés notoires. Peut-être que la présence de quelques hauts responsables de l’Etat encore en exercice les a encouragés à se présenter. De même que les autorités nationales auraient pu éviter à des responsables en exercice de s’afficher à côté de visages connus pour leur corruption dans une occasion qui se présente comme étant anti-corruption. Décidément l’amalgame n’arrange en dernière analyse personne. Même les corrompus supposés sont criblés d’insultes et d’injures par les lecteurs et spectateurs de la toile.
 

Deuxième manifestation inappropriée
Au début de la semaine passée, un groupe de citoyens se présentant comme d’anciens militaires, retraités pour les uns, victimes d’anciens putschs avortés pour les autres. Un objectif commun les rassemblait : protester contre l’exécution d’un projet de règlement du dossier connu sous le nom du Passif Humanitaire, relatif aux dramatiques événements des années 1987-91 du siècle passé. Les participants assimilent leurs cas, aussi divers soient-ils, à la situation des événements en question. Sciemment, ils passent sous silence la succession de drames vécus par la communauté négro-africaine de notre pays durant ces douloureux événements qui n’avaient rien de comparable à des putschs avortés ou non. Là, les victimes civiles se comptaient par centaines. Des dizaines de nos meilleurs officiers et soldats ont été exécutés loin de toute intention ou tentative de coup d’état comme certains mauvais esprits tenaient toujours à créditer. Parmi eux 28 militaires exécutés avec sang-froid un 28 novembre 1990, souillant ainsi et à jamais notre Jour d’indépendance nationale.
Les anciens militaires manifestants, habiles pêcheurs d’occasions, demandent avec insistance de: soit les faire bénéficier des avantages prévus dans le règlement envisagé, soit annuler ce règlement tout simplement. Il semble qu’ils avaient réussi, dans un chantage pareil, à faire plier l’ex-président Aziz lors de sa tentative de règlement du même dossier durant son mandat. Ils auraient bénéficié des mêmes compensations financières accordées par Aziz aux victimes des événements des années de braise.
Dans leur manifestation, ils demandaient à faire bénéficier toutes les victimes de tous les putschs avortés des mêmes compensations qui devraient être accordées aux victimes du Passif Humanitaire. Ils égrènent le chapelet de fameux, célèbres et dramatiques putschs avortés, ainsi que ceux et rares putschs réussis dans notre pays.
Ils commencent par le coup d’état du 10 juillet 1978. Ce premier putsch militaire connu par notre pays avait pour objectif premier de mettre fin à la participation de la Mauritanie à la guerre du Sahara. Cet objectif fut atteint en moins d’une année.
Presque tous les officiers supérieurs de l’armée nationale, à leur tête feu le colonel Mustapha Ould Mohamed Salek, étaient parties prenantes dans ce putsch. Ils avaient agi malgré eux. Tous vouaient un grand respect à l’ex-président Mokhtar Ould Daddah. Ils lui reconnaissent avoir été à l’origine de leur recrutement et leur promotion dans l’armée. Le colonel, feu Ahmed Ould Bousseif, durant son court séjour au pouvoir, n’a cessé de se souvenir de lui en évoquant à chaque fois et avec fierté son titre de « père de la nation ».
 

Le putsch de la délivrance
Le putsch du 10 juillet 1978 ne peut être considéré que comme un coup d’état plutôt positif pour ne pas dire progressiste. En retirant in extremis notre pays du bourbier sahraoui, il l’a sauvé ainsi d’une disparition programmée par des puissances extérieures hostiles. Les reproches qui pourraient être collées après à la gestion des juntes militaires qui vont se succéder à la tête de l’État mauritanien, constituent une autre histoire par rapport à l’exploit déjà réalisé par l’action osée de ce 10 juillet 1978.

Le fameux 16 mars 1981
Moins de trois ans après, intervint une nouvelle tentative de prise du pouvoir par l’intermédiaire d’officiers de valeur. Cette fois-ci, il ne s’agit pas d’un putsch classique. Ce fameux 16 mars 1981 ne pourrait nullement être assimilé à un coup d’état militaire classique. Il s’agissait plutôt d’une ‘’agression extérieure caractérisée. Une agression armée, conçu, organisée et téléguidée de l’extérieur pour être exécutée sur le sol mauritanien’’, selon le pouvoir de l’époque. Le commando, chargé de son exécution et les trois officiers supérieurs qui l’avaient dirigé, leur tâche se limitait strictement à la dernière phrase, c’est-à-dire l’exécution.
Les conditions du succès n’étant pas au rendez-vous, le coup de force échoua lamentablement et aussi dramatiquement. Malheureusement l’agression a fait de nombreuses victimes. Et trois de nos meilleurs officiers, les chefs du commando, ont été exécutés. Paix aux âmes de tous !

La soi-disant tentative de putsch négro-africain
La tentation du pouvoir s’empara de nombreux citoyens, notamment les militaires. En 1987, trois officiers négro-africains mauritaniens furent exécutés suite à une rumeur, du reste très discutable, de vouloir organiser un putsch. Depuis, la tension ne cesse de monter entre le pouvoir du président Maaouiya et la communauté négro-africaine de notre pays.
Malheureusement, pressées par la détérioration continue de leurs conditions de vie, les populations de notre sous-région et ailleurs vont sombrer dans des drames pires que ceux vécus par nous. Des affrontements sanglants vont déchirer la coexistence pacifique millénaire entre des peuples partageant parfois la même langue, la même culture, le même territoire et surtout la même couleur de peau.
Puisse notre classe politique et nos gouvernants nous épargner des fins tragiques comme celles qui secouent actuellement bon nombre de nos voisins. Puissent nos promoteurs des droits humains concernés s’arrangent pour cautionner la proposition de règlement conclu entre le gouvernement et certains des représentants du dossier du Passif Humanitaire afin d’épargner à notre pays des lendemains qui ne chantent pas!
 

L’irruption des idées voyous
Les idées consensuelles militant en faveur de l’unité nationale qui prévalaient au temps de l’ancien régime civil et du MND, avaient laissé place à des groupes de voyous particularistes et nationalistes de tous bords.
 

La tentative avortée de Juin 2003
Les politiques des institutions financières internationales ne cessaient d’appauvrir des pans importants de la population. Le retrait de l’Etat des secteurs sociaux, sanitaires et d’éducation a beaucoup aggravé cette situation. Au niveau de l’armée, les soldats et bon nombre de jeunes officiers ont énormément souffert durant le pouvoir du président Taya. L’armée, en dehors de l’unité chargée de la défense de la présidence de la République, était sous-équipée et mal entretenue. Situation qui va inciter des jeunes officiers à se concerter en vue d’organiser un putsch contre le régime de Ould Taya en juin 2003. Profitant de leurs relations familiales et sous le nom de Voursane Etaghyir (Cavaliers du Changement), ils avaient terrorisé la population de la capitale Nouakchott, et même celle de l’intérieur durant quelques 48 heures. Le putsch a échoué mais le pouvoir en place a vacillé, facilitant ainsi la tâche aux putschistes de juillet 2005. Les meneurs seront jugés immédiatement. Certains ont été libérés, d’autres condamnés pour être amnistiés peu de temps après. Les principaux chefs de l’aventure de juin 2003 bénéficieront d’un traitement de faveur de la part des différents régimes militaires jusqu’à nos jours. Situation qui doit nous épargner aujourd’hui des surenchères au marché « tieb-tieb ».
 

A S Elmoctar