Le ministère de la Santé a annoncé hier que le pays ne compte plus de cas positif suivi du COVID 19 : les dernières analyses l’ont attesté le 18 Avril. Sur les sept enregistrés, six sont déclarés guéris et l’on déplore un décès. Une annonce importante et rassurante pour tous les citoyens mauritaniens. Premier ouf de soulagement du personnel soignant, des autorités sanitaires et gouvernementales, engagés dans la croisade contre cet « ennemi » invisible sans passeport, ni visa, ni billet pour se déplacer. Nombre de responsables ont exprimé leur satisfaction, saluant le travail abattu et la mobilisation générale, depuis l’apparition du premier cas, début-Mars. Certains n’hésitent pas à parler de « performance ». Mais en avons-nous vraiment fini avec le COVID-19 ? Restent encore des mauritaniens confinés, des tests à effectuer, des gestes-barrières à respecter et surtout des frontières à protéger pour éviter des transmissions communautaires : la vigilance doit rester de mise. Le président de la République a demandé aux personnes guéries de respecter les instructions du personnel de santé. La situation paraît sous contrôle mais les autorités sanitaires et étatiques doivent veiller à ce que toutes les mesures soient prises pour éviter au pays une seconde vague. À cet égard, ce qui se passe depuis la fin du confinement en Chine, épicentre de la pandémie, est préoccupant. L’important travail accompli, la formidable mobilisation constatée un peu partout, l’élan de générosité et de solidarité dont ont fait preuve les Mauritaniens – cf. l’afflux massif de dons pour le fonds spécial COVID – ne doivent pas rester vains. Ne faiblissons pas !
Déconfinement ?
Car on constate depuis quelques jours un empressement certain des Mauritaniens à en finir avec le confinement. Beaucoup demandent la réouverture des marchés, magasins et restaurants. Du côté des gares routières et autres transports, courtiers et manœuvres réclament la réouverture des allées et venues entre les régions. Mais n’allons pas trop vite en besogne, même si tant de citoyens vivant au jour le jour accusent durement le coup. On scrute le ciel en l’espérance de l’aide promise par l’État. Les distributions annoncées sont réalisées en certains quartiers mais pour quoi tant d’opacité ? Les gens évoquent des visites nocturnes sélectives d’hommes en tenue, déposant ici et là, presque à la sauvette, quelque kit ou panier de vivres. D’autres sillonnent les banlieues pour, disent-ils, recenser les potentiels bénéficiaires de l’aide publique. Et de prévenir ceux qui logent en maison terrassée béton qu’ils n’en profiteront pas. Est-ce à dire que les nécessiteux sont tenus d’habiter dans des taudis ou carrément des trous ?
L’État risque de dépenser des milliards pour pas grand-chose, sinon engrosser bêtement ceux qui n’en ont pas besoin ou qui ont contribué au fonds spécial COVID. Sont ici visés les hommes d’affaires et divers acteurs de la santé. Si nombreux de ceux-là n’ont guère pâti du COVID, il n’en manquera pas pour se servir de sa cagnotte en place des véritables nécessiteux. Une part conséquente du fonds d’urgence boostera le négoce des consommables et des équipements médicaux. Tout ce beau monde ne se pressera pas à voir trop vite tarir leur si juteux commerce. Bref, les commandes de masques, respirateurs, gels, hydro-chloroquine et autre paracétamol pourraient avoir de beaux jours devant elles, même si le besoin n’est plus pressant. Avec, si nécessaire, l’appui de media complaisants, histoire de conserver le plus intéressant rapport entre la demande et l’offre…
Cela noté, l’heure semble aujourd’hui tout de même au déconfinement. Des rumeurs persistantes circulent en ce sens depuis quelques jours à Nouakchott et à l’intérieur du pays. La déclaration du porte-parole du gouvernement les a accentuées. Au cours du point de presse rendant compte du conseil hebdomadaire des ministres, celui de l’Enseignement supérieur et de la recherche scientifique a déclaré que « le gouvernement étudie l’éventualité d’un allègement de certaines directives administratives ». Et chacun d’aller selon son entendement ou son souhait. On vous assure ainsi que l’interdiction de circuler entre les différentes régions du pays serait levée dès cette semaine, pour trois jours seulement. Histoire de permettre aux citoyens bloqués loin de chez eux de rentrer à demeure pour y passer le mois béni de Ramadan. Mais attention ! Aussi heureuse qu’elle puisse paraître, une telle mesure risquerait, non strictement cadrée dans le temps, former un appel d’air pour des mauritaniens ou autres bloqués dans les pays voisins. Aussi les forces de défense et de sécurité doivent-elles redoubler de vigilance pour contrer toute tentative d’infiltration, d’où qu’elle vienne, et les populations leur apporter concours : il y va de l’intérêt de tous.
DL