Mali-Mauritanie : Achoppements à Aïoun sur la matérialisation de la frontière

10 February, 2015 - 01:36

Remis à l’ordre du jour, lors de la rencontre bilatérale tenue à Aïoun, officiellement du 15 au 19 janvier, le tracé de la frontière, entre les deux pays, a soulevé encore une fois l’épineuse problématique de sa matérialisation. Les discussions, à huis clos, entre les deux délégations ont achoppé lorsque les questions sensibles furent abordées. A défaut de vous livrer l’information à chaud, à cause du black-out médiatique, voici quelques bribes, quoi que tardives, de la rencontre.

Invités à faire des propositions concrètes concernant « l’enclavement des Soubeïlatt dans le secteur 1, celui des villages, dans le secteur 2 ainsi que le tracé de la ligne frontalière », à l’issue de la  rencontre ministérielle tenue, à Nouakchott, du 19 au 20 Novembre 2014, les délégations ne sont pas parvenues à évacuer ces récurrentes questions.

Au menu également de la rencontre : redynamiser les accords en matière de coopération administrative, de renseignements, de transhumance et de libre circulation des biens et des personnes entre les deux pays. De part et d’autre de cette interminable frontière – plus de deux mille kilomètres ! –  poreuse et vaguement tracée, on trouve des villages sur « le territoire d’un des Etats », peuplés par « des citoyens de l’autre ». De tels imbroglios font que chaque Etat s’estime en droit d’y revendiquer sa souveraineté, surtout quand on sait que la frontière, héritée des colons, ou de ce qui en tint lieu, n’est pas matérialisée. Les villageois, qui ne savent pas à quel saint se vouer, s’arrangent pour régler leurs affaires. C’est le cas de ces deux agglomérations voisines juste séparées par la frontière. Celle qui se trouve sur le sol malien exploite, non sans conséquences, des ressources naturelles (bois de chauffe, pailles…) situées dans l’espace agropastoral mauritanien. En contrepartie, les villageois mauritaniens sont autorisés à s’approvisionner en eau, à partir du Mali. Du troc, en plein 21ème siècle !

Selon une source proche du dossier, si la matérialisation de la frontière est d’une extrême importance, pour la Mauritanie, le Mali a, quant à lui, d’autres sujets prioritaires de préoccupation, comme la résolution de la question du Nord, secouée par une rébellion armée aux revendications séparatistes. Et s’il arrive qu’un des pays héberge les opposants de l’autre ? Où passe donc la ligne de partage, entre l’humanitaire et le politique ? « Cette autre « frontière » a aussi besoin d’être définie », confie un participant. Autant de questions qui ne sont pas au menu des discussions !

Cette situation pourrait expliquer, nous a-t-on glissé, le comportement de la délégation malienne qui a évoqué ses limites d’attribution. « Notre ministre de l’Intérieur vient tout juste d’être nommé. Il a besoin de temps, pour voir clair dans le dossier », a lâché un membre de la délégation malienne, selon notre source. L’Administration n’est donc pas une continuité ? Il est vrai que c’est son prédécesseur, le général de division Sada Smaké, ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, qui a paraphé formellement, avec son homologue mauritanien, Mohamed ould Ahmed Salem ould Mohamed Rare, le procès-verbal de la rencontre de Nouakchott.

Les Maliens se sont-ils rétractés ? En tout cas l’atmosphère fut morose. Leur délégation est arrivée avec un jour de retard, contraignant les autorités mauritaniennes à reporter l’ouverture officielle des travaux. A la clôture, prévue le dernier jour à 16 heures, ce furent les Mauritaniens qui ne vinrent pas au rendez-vous. Réponse du berger à la bergère, probablement…

 

Moustapha ould Béchir

Cp Hodhs