8 Juillet 1965 & 8 Juillet 2009 : Confirmation du retrait mauritanien de l’O.C.AM. & Bipolarisation de la campagne pour le premier tour de l’élection présidentielle

9 July, 2014 - 04:20

Le 8 Juillet 1965, la présidence de la République Islamique de Mauritanie confirme que le Chef de l’Etat a informé ses pairs de l’O.C.A.M. de la décision de la République Islamique de Mauritanie de quitter l’organisation. Significativement et comme pour justifier plus qu’il ne sera dit à Nouakchott, c’est à Paris que le 4 Juillet se tient un  « petit sommet » africain réunissant les présidents Houphouet-Boigny, Yaméogo, Léon Mba, Diori Hamani, Grunitzky et Moïse Tshombé, mais c’est de Lomé, le lendemain, que part la. première nouvelle publique que la République Islamique de Mauritanie aurait quitté l’O.C.A.M. Le 23 Juin précédent, ce retrait avait été explicité par une lettre personnelle – donc non publiée – du président Moktar Ould Daddah à chacun des Chefs d’Etat intéressés. Le maintien des liens d’amitié et de solidarité avec chacun des Etats membres de la toute jeune organisation était en  même temps réaffirmé. Le Bureau politique national, en réunion du 7 Juillet, avait « réaffirmé sa ferme décision de maintenir et de consolider les relations bilatérales amicales et de fraternité » unissant la Mauritanie à chacun des membres de l’O.C.A.M. pris en particulier.

 

Le différend est clair : il s’agit factuellement de l’admission ou non du Congo-Léopoldville dont Moïse Tshombé a été nommé Premier ministre. Moktar Ould Daddah, premier président en exercice de la toute récente organisation, fondée à Nouakchott les 14 et 15 Février (Le Calame du 17 Février 2009), refuse que lui soit imposé l’ordre du jour de la prochaine conférence au sommet, qui doit se tenir à Abidjan, et sur le fond que lui soit forcée la main pour admettre un gouvernement dans la nouvelle organisation dont la responsabilité est notoire dans la sécession katangaise et la mort de Patrice Lumumba sinon de celle de Dag Hammarksjoeld, secrétaire général des Nations Unies. C’est pourtant ce qu’il va se passer.Une délégation des Etats de l’Entente est venue à Nouakchott, le 19 Avril, exposer la nécessité d’admettre ce pays et bien davantage encore le chef de son gouvernement. Quatre jours avant, le Bureau Politique National quoiqu’occupé par l’adoption de la liste nationale unique des candidats du Parti aux élections législatives et par l’examen de projets de réglèment intérieur pour la nouvelle Assemblée, avait examiné la situation de l’O.C.A.M. au regard de celle de l’O.U.A. Dès le 28 Avril, le Sénégal se déclare favorable à l’entrée dans l’O.C.A.M. du Congo-Léopoldville que gouverne Moïse Tshombé, et le 4 Mai, Michel Habib-Deloncle, secrétaire d’Etat français aux Affaires Etrangères, fait escale à Nouakchott. En sens exactement contraire, Moktar Ould Daddah, les  7 et 8 Mai, donne audience à Cyrille Adoula ancien chef du gouvernement de Léopoldville et bien placé pour succéder à Moïse Tshombé.

C’est alors une succession de télégrammes se croisant dans les capitales africaines, parfois à l’insu du président de l’organisation.  Le 9 Mai, Félix Houphouet-Boigny fait savoir à Moktar Ould Daddah, que de « nombreux Chefs d’Etat membres OCAM viennent de donner  accord date  conférence Abidjan 25 Mai ». Le surlendemain, Léopold Sedar Senghor demande au président de l’O.C.A.M. d’éviter de faire croire que la date du sommet extraordinaire a été choisie en fonction d’une éventuelle investiture de Cyrille Adoula.  Le 14, le président sénégalais insiste : « rien ne nous empêche de nous réunir pour admettre un Etat francophone à se joindre à nous pour précisément discuter de la future charte de l’O.C.A.M. », Moktar Ould Daddah tente de gagner du temps et fait savoir à chacun de ses pairs, en circulaire que leur collègue camerounais, Ahmadou Ahidjo, ne peut quitter son pays avant le 15 Juin, et précise le 18 Mai que « n’ayant pas position identique vis-à-vis principal point ordre du jour réunion extraordinaire, il est indispensable que tous Chefs Etat OCAM soient présents en vue dégager solution susceptible sauvegarder cohésion notre organisation ». Mais l’opposition entre l’ivoirien et le mauritanien est insoluble : leurs échanges de télégrammes les 21 et 22 Mai la consacre, malgré l’intimité née d’un long séjour du second chez le premier à la fin de l’année précédente et qui avait conduit, précisément à la fondation de l’O.C.A.M. [i] Contrairement aux propositions de dates de son président, correspondant d’ailleurs aux vœux de conclusion de la conférence fondatrice de Février, le sommet extraordinaire se tient dès le 26 Mai, à Abidjan et Moïse Tshombé y est admis. Il sera brutalement congédié, moins de cinq mois après, par le président Kazavubu, et sa nomination à la tête d’un gouvernement dit de transition sera alors expliquée comme la seule façon à ce moment-là de rapatrier d’Angola les « gendarmes katangais » et de les intégrér à l’armée nationale congolaise [ii]. Absents, le président en exercice et aussi les présidents du Congo-Brazzaville, du Cameroun, du Ruanda et de la République centrafricaine s’étant fait excuser. C’est à un envoyé de son homologue sénégalais tentant, le 29 Mai, de lui faire admettre la tenue de cette réunion et les décisions qui y ont été prises que Moktar Ould Daddah fait part des siennes : la République Islamique de Mauritanie se retire de l’O.C.A.M.

 Sans l’avoir voulu, le président mauritanien inscrit son pays dans un mouvement de révision et de mise au point des relations internationales. Le renversement inopiné d’Ahmed Ben Bella a fait reporter, le 26 Juin, la conférence au sommet afro-asiatique (qui devait se tenir à Alger au moment du coup d’Etat) au 5 Novembre. A Bruxelles, c’est « impasse » entre les Six à propos du financement des règlements agricoles et le 1er Juillet, quoiqu’à cinq mois de la première élection présidentielle au suffrage universel direct – on ne sait d’ailleurs pas si le général de Gaulle s’y portera candidat – le gouvernement français adopte une « position d’abstention » à l’égard du Marché Commun. Mais Moktar Ould Daddah amorce aussi ce qui avait eu ses prémisses quand il avait choisi une voie différente de tous ses homologues de l’Afrique d’expression française en proclamant l’indépendance de son pays, sans le préalable d’accords de coopération qui ne furent négociés et conclus que six mois ensuite (Le Calame des 4 et 17 Juin 2008). Il y a en germe la demande inopinée sept ans plus tard que soient révisés ces accords (Le Calame du 12 Février 2008). En effet, le Président ne veut pas d’une prolongation d’un système politique franco-africain exclusif, sous des apparences de simple coopération technique. La décision mauritanienne est donc accueillie – fort mal – à Paris et dans les capitales africaines les plus proches, à l’époque, de l’ancienne métropole  [iii] : Moktar Ould Daddah est un perturbateur. Ne reconnaît-il pas la Chine populaire le 19 Juillet [iv], n’a-t-il pas écouté sans broncher le discours de distribution des prix au lycée de Nouakchott, celui de Mohameden Ould Babbah exposant les motifs d’une arabisation de l’enseignement (Le Calame du 6 Juin 2007), et ne donne-t-il pas une bonne part des responsabilités à l’ancienne Nahda dans le nouveau gouvernement [v]qu’il forme le 26 Juillet ? C’est en tout cas la synthèse que communique l’ambassadeur de France, Jean-François Deniau, à Paris [vi] .

 

 

 

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Le 8 Juillet 2009, la très courte campagne pour le premier tour de l’élection présidentielle[vii], censément ouverte depuis le 2 Juillet seulement, connaît déjà un tournant. Les observateurs comme les concurrents : encore neuf candidats en lice [viii] s’accordent sur la probabilité d’un second tour, même si le général putschiste Mohamed Ould Abdel Aziz, qui a donné le 15 Avril précédent la présidence de la junte au général Mohamed Ould Cheikh Mohamed Ahmed dit El Ghazouani et Ahmed Ould Daddah affirment chacun pouvoir gagner dès le premier… La rumeur court soudainement que deux des directeurs de campagne auraient échappé de peu à une arrestation sans motif, mais du genre de celle qui frappa l’un des candidats et ses lieutenants, la veille puis le lendemain du scrutin du 7 Novembre 2003 (Le Calame du 4 Novembre 2008), le dernier qu’ait remporté le précédent homme fort, le colonel Maaouya Ould Sid’Ahmed Taya. Il s’agit cette fois de Yahya Ould Sid’El Mustaph et de Mohamed Mahmoud Ould Mohamed Salah [ix]. L’ordre téléphonique aurait été donné, au téléphone, de la bouche-même de l’ex-président de la junte mais annulé par son successeur à ce poste et se trouvant alors à Tunis. L’affaire tourne court [x] : elle donne à penser que les militaires se divisent pas seulement pour une pluralité de candidatures puisqu’ils sont trois à se présenter, mais dans la hiérarchie active.

 

Le ton devient alors virulent[xi]. Principalement celui de Mohamed Ould Abdel Aziz, accusant Ahmed Ould Daddah et Messaoud Ould Boulkheir « de baigner dans la gabegie » : « je possède des dossiers accablants que je vais publier, prouvant l’implication d’Ahmed Ould Daddah et de Messaoud Ould Boulkheir dans la gabegie… Soyez vigilants, il n’y a que deux pôles : celui du changement représenté par la ‘rectificarion du 6 Août’ et celui des malfaiteurs ». Ceux-ci répliquent « qu’il ne peut que s’agir de dossiers fabriqués, sans la moindre preuve » et le président de l’Assemblée nationale, Messaoud Ould Boulkheir assure qu’ « Ould Abdel Aziz représente une illustration vivante de la concussion (et qu’il) fait ces tapages pour faire oublier l’origine de la formidable richesse mal acquise dont il dispose ». Pour Ahmed Ould Daddah, « ce genre d’homme ne saurait prétendre à gouverner le pays ». Ely Ould Mohamed Vall, plus sobre estime que « le choix pour les Mauritaniens se situera entre la dictature et la démocratie ». A quoi réplique le général pustchiste [xii] … la Banque centrale de Mauritanie aurait été pillée en 2004, et il existerait maintenant « une connivence de certains candidats avec le père du mal, établi à l’étranger (pour) prendre le pouvoir ». A la veille du premier tour – le second étant prévu pour se tenir le 1er Août… – Messaoud Ould Boulkheir déclare accepter par avance les résultats « s’ils ne sont pas truqués » mais que l’ex-chef de la junte « ne deviendra jamais président de la Mauritanie qu’il a conduit vers l’abîme ». Plus conciliant, Ahmed Ould Daddah promet « la formation d’un gouvernement d’union nationale » dont pourront faire partie des soutiens du général « qui ont la compétence requise », lui-même « président de tous, sans aucun règlement de comptes ».

 

La Haute autorité de la presse et de l’audiovisuel (H.A.P.A.) doit donc constater en fin de campagne [xiii] « que des dérapages verbaux ont émaillé la campagne présidentielle en cours… des accusations graves portées contre le candidat Messaoud Ould Boulkheir, président de l’Assemblée nationale, ont été diffusées sur les antennes de la chaîne publique, au journal télévisé du lundi 12 juillet… (et elle) regrette que les critères professionnels et déontologiques n’aient pas été respectés en la circonstance ». A trois jours du scrutin, elle rappelle « à tous les candidats la nécessité absolue de respecter les stipulations et les principes de la loi et de s’en tenir particulèrement aux impératifs de tolérance, de respect de l’autre et de responsabilité ». Et aux médias publics, la H.A.P.A. renouvelle « ses directives concernant l’observanace d’une neutralité structe entre tous les candidats et l’interdiction qui leur est faite de se faire l’écho de propos ou déclarations touchant à la dignité des personnes et aux principes moraux et politiques qui fondent la République ». Mais elle n’empêche pas, au contraire, la fermeture l’avant-veille du premier tour, de la station privée proche de l’opposition : Radio For Mauritania [xiv] dont le matériel est saisi. Non autorisée, la station couvrait l’agglomération de Nouakchott sur la bande FM depuis l’ouverture de la campagne. Pour Omar Ould Dedde, son responsable, le poste « a contribué à reposer la question de la libéralisation des ondes et enrichir le débat politique ». Il n’existe alors pas de statut pour les entreprises privées d’audio-visuel : une loi a été votée au début de 2008, soit un débat au fond mené dès l’élection de Sidi Mohamed Ould Cheikh Aballahi mais elle n’était pas encore examinée par le Sénat, au jour du putsch.

 

Le comité de suivi du Groupe de contact international pour la Mauritanie, notamment actif pour les négociations tenues en Mai-Juin à Dakar, affiche cependant son optismisme, quoique ce ne soit fondé que sur l’ambiance d’une réunion avec les signataires de l’accord de Dakar : « nous nous sommes rencontrés, nous leur avons recommandé notamment de garder confiance dans le processus électoral, d’y croire profondément et travailler pour une élection transparente et apaisée. S’il y a des preuves de fraude le jour du vote, des voies de recours s’offrent à tous, avec l’appui des observateurs qui seront présents partout ». Pour l’opposition d’origine ou récente au putsch, « il existe des signes de fraude probable de la part du candidat Mohamed Ould Abdel Aziz ». D’ailleurs, la caution de ces observateurs étrangers est de pure forme, puisque les observateurs étrangers, de deux cent cinquante à trois cent, envoyés par l’Union africaine, l’Union européenne, l’Organisation internationale de la francophonie et la Ligue arabe, n’arrivent qu’à la dernière minute. On est donc très loin des préalables et précautions énumérés par ceux qui ont rédigé et forcé l’accord : « La conséquence d'une telle option est le déplacement du problème vers la transparence des élections en amont comme en aval, c'est-à-dire la fiabilité du fichier électoral, la crédibilisation du scrutin dans son ensemble, l'égalité de traitement des candidats par les médias du service public, la neutralité de l'administration territoriale, l'observation rigoureuse du processus dans son ensemble par la communauté internationale sous la houlette de l'Union africaine assistée par des partenaires majeurs comme la Ligue des Etats Arabes (LEA), l'Organisation de la Conférence Islamique (OCI), l’Organisation des Nations Unies (ONU), l'Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), l'Union Européenne (UE), et les membres africains et les membres permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU.» Le précédent de la transition d’Août 2005 à Avril 2007 était pourtant exprès et d’expérience mauritanienne : le concours à une élection sincère, surtout quand certains des protagonistes sont à eux-mêmes leurs seules règle et référence, suppose plusieurs mois, idéalement une année calendaire. 2009 servira de « modèle » pour 2014, à cela près que l’opposition surprise le 18 Juillet ne s’est pas fait reprendre pour le 21 Juin.

Ould Kaïge

Prochaine chronique :

18 Juillet 1966 - Inauguration de la commission nationale des affaires culturelles

&

18 Juillet 2009 - Election présidentielle du général Mohamed Ould Abdel Aziz

 

 

[i] - dans ses mémoires La Mauritanie contre vents et marées (Karthala. Octobre 2003. 669 pages), Moktar Ould Daddah donne l’ambiance de ces conversations, pp. 433-434 : « jusqu’en Octobre 1964, à Yamoussoukro, je n’avais jamais eu avec lui de tête-à-tête prolongés. Et, je dois l’admettre, malgré tout le respect et l’affection que je lui vouais, j’avais des préjugés contre ses idées panafricanistes et tiers mondistes qui étaient différentes des miennes, du moins dans leur expression : je me sentais plus proche de Kwame N’Krumah, Jemal Abdel Nasser et Ahmed Sékou Touré que d’Houphouët-Boigny et de ceux qui pensaient comme lui.               

Nous voici donc cinq jours durant presque toujours ensemble, puisque je logeais chez lui, dans sa maison familiale. Nous étions souvent seuls. Nous avons fait de longues promenades, à pied, en voiture et visité des fermes et des champs situés sur son vaste domaine où il était vraiment dans son élément, détendu, disponible, m’expliquant tout sur la vie paysanne.       

Ainsi, j’ai eu le privilège d’écouter ces longs monologues dont il a le secret et dont on ne se lasse jamais. Ce sont d’inappréciables leçons de choses et qui sont irremplaçables pour l’Africain qui veut plonger dans les profondeurs de la sagesse africaine, dans l’authenticité africaine pure. Des leçons d’histoire ancienne et moderne de la Côte d’Ivoire, de l’Afrique de l’Ouest, de toute l’Afrique avant et pendant la colonisation. Le rappel historiques des faits et méfaits du colonialisme et de ce qu’il faisait pour tyranniser et exploiter les populations africaines, ivoiriennes en l’occurrence. Le récit enfin des étapes de la lutte anti-colonialiste multiforme, comme celle que Félix Houphouet-Boigny mena au sein de l’Association des planteurs de Côte d’Ivoire, première organisation nationaliste et anti-colonialiste ivoirienne.

Quelle mémoire prodigieuse ! Le Président se souvenait encore des premiers malades qu’il soigna à son installaton en 1925 comme jeune médecin africain dans la petite localité d’Abidjan ! Comme il se souvenait par le détail de ses premiers pas de jeune député débarquant dans Paris, au lendemain de la Libération et évoluant au milieu des différents courants politiques qui se partageaient l’Assemblée française.       

Durant ces jours mémorables, le Doyen  me parla à coeur ouvert, me parla avec amitié, avec confiance et, finalement, avec affection. Il m’apprit beaucoup sur lui-même, sur notre région, sur le monde et je découvris en lui un patriote, un nationaliste, un Africain authentique ayant un sens très élevé de la dignité et de l’honneur africain. Il se révéla à moi comme étant le contraire de ce que je croyais de bonne foi : je le prenais pour un francophile docile, inconditionnel aux mains de la France ! Quelle erreur de ma part, erreur que partageaient beaucoup de ceux qui n’ont pas eu, comme moi, le privilège de le connaître de près, de connaître le véritable Doyen.    A la fin de mon séjour, notre mutuelle affection s’était considérablement renforcée. Quant à l’objet de ma mission, le Président Houphouët-Boigny me donna son accord pour participer au sommet de l’U.A.M.C.E. dont il propose, comme lieu, Nouakchott à la place de Tananarive initialement prévue. Proposition que je soumis aux Chefs d’Etat membres qui l’acceptèrent unanimement ».

[ii] - télégrammes n° 2160 à 2164 expédiés par l’ambassade de France à Léopoldville le 13 Octobre 1965 (Documents diplomatiques français – 1965. tome II pp. 431 et ss.)

 

[iii] - ibid. pp. 434 à 437

« Avant la fin de nos travaux, plusieurs collègues, avaient posé le problème de la candidature du Congo- Léopoldville. Nous avons convenu qu’en tant que président en exercice, je devais convoquer un sommet extraordinaire dont ils me laissaient le choix de la date et du lieu. Sommet qui devait discuter de la question.    

Peu de temps après, plusieurs collègues me saisirent, qui par télégramme, qui par lettre, pour me presser de réunir ce sommet. Malgré mes réserves personnelles à l’égard de Moïse Tschombé qui, à mes yeux, était un Africain dont la présence me paraissait compromettante pour la crédibilité de l’O.C.A.M., j’entamais mes consultations en vue de fixer une date et un lieu. A l’issue de ces consultations, je proposai le 8 Mai à mes pairs, de nous retrouver en Abidjan, le 17 Juin suivant. Dès le lendemain de ma proposition, le Président Houphouët-Boigny me fit savoir que de “ nombreux chefs Etat membres O.C.A.M. viennent de donner leur accord à la date du 25 Mai pour notre conférence d’Abidjan 25 Mai ”. Et le 14, le Président Senghor ajouta que “ rien ne nous empêche de nous réunir le 25 Mai pour admettre un Etat francophone à se joindre à nous pour précisément discuter de la future charte de l’O.C.A.M.”. Des termes de ces deux messages, je déduisis que mes collègues avaient, à mon insu, mené des consultations parallèles aux miennes, ce qui, pour le moins qu’on en pouvait dire, constituait un manque flagrant de courtoisie à mon égard. Sans faire part de mes états d’âme à mes homologues, je leur adressai un télégramme circulaire leur précisant que le Président Ahidjo ne pouvant quitter le Cameroun avant le 15 Juin, je maintenais ma proposition de nous réunir le 17 Juin. Et d’ajouter que “n’’ayant pas de position identique vis-à-vis du principal point d’ordre du jour de notre réunion extraordinaire, il est indispensable que tous les chefs d’Etat de l’O.C.A.M. soient présents en vue de dégager une solution susceptible de sauvegarder la cohésion de notre organisation”.           

Ignorant mes arguments, le sommet extraordinaire se réunit le 26 Mai, donc sans moi et en l’absence de trois autres Chefs d’Etat, dont celui du Cameroun. Il admit la République Démocratique du Congo en la personne de Moïse Tschombé ! Le 29 Mai, je reçus André Guillabert, envoyé spécial du Président Senghor pour me rendre compte au nom des Chefs d’Etat réunis à Abidjan, du déroulement de la Conférence d’Abidjan. Je lui rappelai la position de la République Islamique de Mauritanie vis-à-vis des problèmes qui se posent à l’Afrique. Puis, je lui exposai de nouveau les raisons objectives de mon absence à Abidjan. Enfin, je lui fis part de la décision de la République Islamique de Mauritanie de quitter l’O.C.A.M. car la souplesse diplomatique, ajoutais-je, a des limites et notre dignité nationale a été bafouée.

Le 23 Juin, par lettre personnelle je confirmai, à chaque chef d’Etat intéressé, le retrait de la République Islamique de l’O.C.A.M. En même temps, je fis part à mes homologues de la volonté de mon pays de maintenir les meilleurs liens d’amitié et de solidarité avec chacun des Etats membres de l’organisation ainsi que de notre désir de rester membre de ses organismes ations techniques, en particulier d’ Air Afrique.     Notre décision mécontenta particulièrement les Français et le Président Senghor. Celui-ci, rencontrant le Président Modibo Keïta à Kayes, à l’occasion du jumelage de cette ville avec Saint-Louis du Sénégal, jumelage qui devait sceller la réconciliation sénégalo-malienne, tint à son hôte et d’après ce dernier, les propos suivants : “ Moktar veut jouer au nationaliste arabe. Il veut introduire l’arabisme nassérien dans notre région. Il oublie que c’est grâce à la France et à l’U.A.M. que le Maroc n’a pas annexé la Mauritanie et que cette dernière siège aux Nations-Unies. C’est un ingrat. Moktar oublie surtout la fragilité de la Mauritanie où les Noirs du Sud, des Sénégalais, ne veulent pas se laisser assimiler par les Maures racistes. Les Noirs Mauritaniens que Moktar veut arabiser ne se laisseront pas faire. Ils vont bouger pour lui rappeler qu’ils n’acceptent pas d’être coupés de l’Afrique noire. Ils vont lui donner du fil à retordre. Peut-être y perdra-t-il sa place. Il y a d’autres Maures qui ne sont pas Nassériens, qui ne sont pas panarabes, qui sont donc plus raisonnables que lui et dont l’un pourrait très bien le remplacer à la tête de la Mauritanie....”.

Rentré à Bamako, Modibo me proposa une rencontre urgente dont il me laissait le choix du lieu, en Mauritanie ou au Mali. Je proposai Néma où nous convînmes  de nous rencontrer le 19 Juin. A Néma, Modibo me précisa qu’il avait demandé cette liaison uniquement pour m’avertir et me mettre en garde contre ce que les Français et lePrésident Senghor tramaient contre moi. Et de me rapporter les propos senghoriens cités plus haut. Propos qu’il compléta et commenta : “ Senghor fait croire à tout le monde, aux Français en particulier, que la Mauritanie suit le Sénégal comme son ombre, qu’elle en dépendait dans tous les secteurs, qu’elle ne peut donc aller contre la volonté sénégalaise. Senghor, sachant que l’ère de l’hégémonie sénégalaise sur notre région est à jamais révolue en même temps que  l’A.O.F. et le colonialisme français, se console en  se disant qu’au moins la Mauritanie lui restera inconditionnellement fidèle, et suivra le Sénégal dans son isolement en  Afrique. Et voilà que tu oses démontrer le contraire ! Je connais très bien Senghor. Je connais ses sentiments à l’égard de la Mauritanie. dont nous avions beaucoup parlé pendant que nous étions ensemble dans la Fédération du Mali, quand nous voulions, lui et moi, vous obliger, vous Mauritaniens, à adhérer à notre Fédération. Senghor ne te pardonnera pas ta sortie de l’O.C.A.M. qu’il considère comme un affront personnel. Les Français sont aussi furieux que lui. Tous chercheront à se débarrasser de toi. Méfie toi....”.

 

[iv] - ce ne sera rendu public que le 26

 

[v] - Président de la République,                                                                 Me Moktar Ould Daddah

Affaires Etrangères & Défense Nationale                                            Mohamed Ould Cheikh

Garde des Sceaux, Justice & Intérieur                                                  Ahmed Ould Mohamed Salah

Finances, Plan & Fonction publique                                                       Bamba Ould Yezid

Développement                                                                                             Elimane Mamadou Kane

Construction, Travaux publics & Transports                                        Yahya Ould Menkouss

Education & Culture                                                                                      Baham Ould Mohamed Laghdaf

Jeunesse, Information & Télécommunications.                                Sidi Mohamed Ould Abderrahmane

Santé, Travail & Affaires sociales                                                             Sidi Mohamed Diagana

 

[vi] - singulièrement, le recueil français de documents diplomatiques pour ces mois-là ne retient aucun des télégrammes sur le retrait mauritanien de l’O.C.A.M….

 

[vii] - brièveté expressément imposée par  les zélateurs de la négociation de Dakar : « Entre une transition courte qui s'achève par l'organisation d'élections présidentielles en juillet ou bien une transition longue qui se conclut vers la fin de l'année, ils retiennent la première option pour les raisons suivantes: l'Union africaine, dans les situations de changement anticonstitutionnel, demande toujours que la transition et le retour à l'ordre constitutionnel soient organisés dans les six mois. La Communauté internationale soutient l'Union africaine dans cette option d'une transition courte mais bien organisée vers le retour à l'ordre constitutionnel.»

 

[viii] - il est intéressant de retenir la présentation que fait  à l’époque l‘Agence France presse de ce qu’elle considère comme les principaux candidats, omettant Ibrahima Moktar Sarr, qui déjà candidat en 2007 avait obtenu 8% des suffrages et dont c’est la seconde candidature - Baba Hamidou Kane, dissident du R.F.D. et vice-président de l’Assemblée Nationale, le commandant Saleh Ould Hanenna qu’a rendu célèbre sa tentative de putsch le 8 Juin 2003 à la tête des « cavaliers du changement » et Hamadi Ould Meimou  

 

Citation – Agence France presse, Nouakchott – 16 Juillet 2009, 10 heures 13

 

- Le général Mohamed Ould Abdel Aziz.

Né en 1956 à Akjoujt (centre-nord), il est issu d’une famille de commerçants établie à Louga (Sénégal). Il a fait sa formation d’officier intrer-armes à l’Académie militaire royale de Meknès (Maroc), puis en logistique à Alger. Il a notamment occupé la fonction d’aide de camp du président Maaouiya Ould Taya (1984-2005) qui lui confia en 1998 la direction du Bataillon de sécurité présidentielle (BASEP). Le général Ould Abdel Aziz a fait partie du groype d’officiersayant renversé le président Ould Taya le 3 août 2005. Il demeure le responsable de la garde présidentielle sous les présidences du colonl Ely Ould Mohamed Vall (2005-2007) t de Sidi Ould Cheikh Abdallahi (2007-2008). Ould Abdel Aziz renverse le premier président démocratiqueent élu du pays le 6 août 2008.

 

- Ahmed Ould Daddah

Demi-frère du premier président de la Mauritanie et « père de l’indépendance », Moktar Ould Ddadah, le dirigeant du premier parti d’opposition est né en 1942 au sein d’une famille maraboutique.Opposant historique, il s’est présenté à deux reprises au scrutin présidentiel contre Ould Taya, et a perdu au second tour contre Ould Cheikh Abdallahi en 2007, rassemblant plus de 47% des voix. Il a dans un premier temps soutenu le putsch du 6 août 2008, le présentant comme un « mouvement de rectification » avant de le dénoncer, quelques mois plus tard, comme un « véritable coup d’Etat ». il s’oppose alors à la candidature des militaires de la junte et s’oppose vigoureusement à la tenue du scrutin présidetiel le 6 juin. Ould Daddah est le candidat de son parti, le Rassemblement des forces démocratiques (RFD).

 

- Messaoud Ould Boulkheir

Il est né n 1943 non loin de Nema (sud-est) d’une famille d’aanciens esclaves. Adinistrteur civil, il occupe les fonctions de gouverneur, de préfet et de ministre (de 1984 à 1988) sous Ould Taya. Il fonde en 1978 le mouvement anti-escskavagiste El Horr, qu’il a voulu comme « un cadre patriotique de lutte pour la justice sociale et l’émancipation des couches défavorisées, loin de tout esprit sectaire et de tout extrêmisme. Il a été emprisonné à olusieurs reprises pour son engagement anti-esckavaagiste. En 1991 et 2006, il st élu député à l’Assemblé nationale, vanat d’en devenir le présidet. Son opposition déterminée au putsch du 6 août 2008 l’a rendu célèbre en Mauritanie et au-delà des frontières. Il est le canidat du Front national pour la défense de la démocratie (FNDD, anti-putsch).

 

- Colonel Ely Ould Mohamed Vall

Né en 1952 à Nouakchott, il a fait sa formation d’officier à l’Académie militaire de Meknès. Titulaire d’une maîtrise en droit, il gravit rapidement les échelons pour finir commandant de régions militaires et dirige pendant plus de 20 ans l police mauritanienne sous le régime de Ould Taya. Le 3 août 2005, il devient présidet du conseil militaire qui renverse Ould Taya et dirige une transition démocratique réussie (2005-07)

 

- Jemil Ould Mansour

Premier candidat d’un parti islamiste en Mauritanie, Ould Mansour  est né en  1967 près de Nouakchott. En raison de ses idées, il a été emprisonné à plusieurs reprises et s’est réfugié en Belgique après une vague d’arrestations dans les milieux islamistes en 2005 sous Ould Taya. Il a fondé par la suite un parti islamiste modéré, Tawassoul (5 députés), qui a até reconnu en 2007.

– fin de citation

 

[ix] - agrégé des facultés de droit françaises et fils du principal co-équipier du président-fondateur, Moktar Ould Daddah

 

[x] - selon Taqadoumy. 7 Juillet  Il était environs 17h, hier, quand le portable du Chef d'Etat-major adjoint de la Garde nationale, Mesgharou Ould Sidi sonne ; à l'autre bout du fil, le Général-candidat Mohamed Ould Abdel Aziz lui ordonne de procéder, immédiation, au placement, en détention, de Yahya Ould Sid’El Moustaph et de Mohamed Mahmoud Ould Mohamed Saleh.

Il s'agit, respectivement, du directeur de la campagne de Messaoud Ould Boulkheïr et d'Ahmed Ould Daddah.

Le Colonel Mesgharou répond par un "à vos ordres, mon Général" fort obséquieux ; après avoir raccroché, il appelle le numéro de téléphone du Général Mohamed Ould Ghazouani, Chef d'Etat-major de l'Armée nationale et président du Conseil supérieur de la défense nationale (ex-Haut Conseil d'Etat), dont Mesgharou est membre.

Ould Ghazouani, se trouvait à Tunis ; il lui ordonne de procéder exactement à l’inverse des consignes d’Ould Abdel Aziz, c'est à dire ne rien faire. Le Général Ould Ghazouani interrompt son voyage et rentre le soir même à Nouakchott.

Il convoque Mesgharou et lui intime de ne plus prendre ses ordres de Ould Abdel Aziz, mais par lui même quand il s'agit des questions de sécurité nationale.

Quand il est question des affaires courantes, Mesgharou s’entend répéter, par Ould Ghazouani, le devoir, pour lui, d’en référer à ses supérieurs hiérarchiques, à savoir le Général Félix Négri, Chef d'Etat-major de la Garde nationale ou, alors, le ministre de l'Intérieur dont relève ce corps militaire.

Il y a lieu d’en faire le rappel à la lumière des risques de troubles lors du scrutin du 18 juillet 2008, le Général Ould Abdel Aziz avait pris l’habitude, jusqu’aux récents accords de Dakar de jurer que, lui vivant, deux hommes n’occuperaient jamais la Présidence  de la Mauritanie : Ely Ould Mohamed Vall et Ahmed Ould Daddah, justement ses concurrents aujourd’hui.

 

[xi] - Agence France presse, Nouakchott – 8 Juillet 2009, 08 heures 53

 

[xii] - Ibid. 17 Juillet 2009, 12 heures 56

 

[xiii] - Ibid. 15 Juillet 2009, 21 heures 30

 

[xiv] - Ibid. 16 Juillet 2009, 20 heures 02