Cheikh Sidi Ahmed Ould Babamine, président du FNDU: «la démocratie dans notre pays, dont les institutions étaient déjà au plus mal, s’est davantage enfoncée dans l’inconnu»

20 July, 2014 - 20:15

A la suite des élections présidentielles boycottées par les partis de l’opposition regroupés autour du FNDU (Forum Nationale pour la Démocratie et l’Unité), Cheikh Sidi Ahmed Ould Babamine, président du forum s’exprime sur les colonnes de Sahara medias. 

 

Sahara Medias : Après la victoire d’Aziz, comment voyez-vous l’avenir de la démocratie en Mauritanie ? 

Ould Babamine :A l’issue du dernier scrutin présidentiel du 21 juin  organisé en l’absence de tous les partis membres du FNDU , de  l’APP et d’autres formations politiques et dont les résultats étaient , connus d’avance , bien évidemment ,  la démocratie dans notre pays, dont les institutions étaient déjà au plus mal,  s’est davantage enfoncée dans l’inconnu. Il serait donc très prétentieux de ma part d’essayer d’en deviner l’avenir  notamment si l’on en  jugeait par le discours belliqueux développé lors de sa campagne électorale par le candidat à sa propre succession.  

Sahara medias : Les félicitations adressées au président réélu par la France, l’Allemagne entre autres,   ne donnent-elles pas une crédibilité à ces élections que vous considérez comme une mascarade ? 

Ould Babamine : Je persiste et signe que c’en est une mascarade. Ce qui    aurait donné de la crédibilité à ces élections, à l’intérieur comme à l’extérieur, aurait   été    la  transparence et la participation de toute la classe politique mauritanienne dont je n’ai pas besoin de vous rappeler ni   le nombre ni  l’importance des partis et autres forces sociales qui ont été   obligés de  boycotter ce scrutin faute de garanties d’équité nécessaires  formulées par le FNDU et autres formations politiques comme l’APP. 
Par ailleurs, et si vous lisez attentivement certains  messages de félicitations   qui  ont été adressés au Président Mohamed Ould Abdel Aziz  en particulier  celui du Président Hollande et celui de l’Union Européenne, vous constaterez qu’ils ont  formulé des reproches à ces élections notamment quand, diplomatiquement,  ils évoquent la nécessité de poursuivre le dialogue pour l’approfondissement de la démocratie dans notre pays. Ajouté à leur   refus   non moins diplomatique d’observer  ces élections,  une telle  réserve  en dit  assez sur l’appréciation de ces partenaires extérieurs quant à  ce scrutin présidentiel. Ceci étant, nos  partenaires Européens et Français en particulier ont d’autres  intérêts plus  immédiats  dont   ils croient peut être  que la préservation justifie de fermer les yeux sur le recul de la démocratie   dans notre pays. Ce qui invite à ne plus se faire beaucoup d’illusion dans ce domaine. 

Sahara medias : L’opposition est-elle laminée ? 

Ould Babamine : Si le refus de participer à des élections organisées loin des normes et standards internationaux et sous le contrôle d’institutions inféodées au pouvoir d’un Président candidat qui ne leur accorde aucune chance de transparence, si cela équivaut pour vous à être laminé, je comprends  votre question. 
Sinon,  et en ce qui me concerne, je constate au contraire, qu’en dépit de toutes les injustices qu’elle subit depuis ces dernières années et de la précarité de ses moyens,  l’opposition mauritanienne dans sa diversité, en particulier à l’occasion de la dernier échéance électorale,  a su faire preuve  de  fermeté, de cohérence et surtout  de cohésion face à la volonté du pouvoir d’imposer l’organisation  d’élections non transparentes et non consensuelle. Elle est d’ailleurs  d’autant moins laminée que sa capacité de mobilisation s’en est trouvée au contraire renforcée. 

Sahara medias : Quel sera l’action du FNDU durant ce dernier quinquennat d’Ould Abdel Aziz ? 

Ould Babamine : Il faut d’abord souligner que pour le FNDU ce que vous appelez le quinquennat de Ould Abdel Aziz aurait dû à gagner à être le fruit non pas d’un hold-up électoral mais d’une élection transparente et crédible. Ce qui  n’est malheureusement pas le cas et le FNDU,  non seulement continuera de  le contester, à toutes les occasions,  mais aussi à mobiliser l’opinion nationale et internationale contre une telle illégitimité et pour le retour à des élections consensuellement organisées et crédibles. 
  
Sahara medias : L’Affaire de Mohamed Ould Borboss n’annonce-t-elle pas une future implosion du FNDU ? 
Ould Babamine : Ce que vous appelez l’affaire Mohamed Ould Borboss risque d’autant moins de faire imploser le FNDU qu’il s’agit d’un problème interne d’un parti qu’il semble avoir résolu en interne et en application des   textes qui sont les siens. Le parti El Moustaqbel continue de jouer son rôle au sein du Forum  et Monsieur Borboss demeure pour nous un frère et un ami où qu’il soit. 

Sahara medias : Quel sera  l’avenir du FNDU ? 

Ould Babamine : Comme vous le savez, le FNDU est une convergence  de forces politiques et sociales  rassemblées  autour de la nécessité  d’une part,  de normaliser la vie politique nationale  et d’autre part,  de  rechercher des solutions justes et  durables  aux différents problèmes qui constituent à l’heure actuelle  une grande menace pour l’unité, la stabilité, la cohésion et le développement harmonieux de notre pays . 
Apres avoir vainement cherché à obtenir avec le pouvoir les garanties  de transparence nécessaires pour faire des dernières élections présidentielles une amorce de  sortie  pour la  crise politique où le pays se débat depuis de longues années,  le FNDU   a néanmoins  donné la preuve,  en très peu de temps,   de sa capacité de  mobiliser la majorité des mauritaniens autour de ses objectifs, notamment par le boycott massif observé par nos concitoyens lors de ce scrutin comme  à l’occasion de la marche du 4 juin dernier à Nouakchott et de celle de Nouadhibou. 
Pour  l’avenir,  le FNDU qui conteste toute  légitimité au mandat présidentiel issu du scrutin du 21 juin dernier,  continuera sans relâche à lutter pour la normalisation de la vie politique nationale pour la promotion de la démocratie et, comme je les ai  cités plus haut, pour la réalisation de ses objectifs d’unité, de stabilité, de cohésion et de développement  harmonieux du  pays. 
Propos recueillis par NCO