Trois questions à Mohamed Ould El Abed, ancien ministre, économiste et Vice-président de Convergence Démocratique Nationale (CDN): ‘’Les priorités du pouvoir ne sont pas le dialogue. Elles sont ailleurs, et bassement matérielles’’

22 October, 2015 - 02:05

Le Calame : La réponse négative du FNDU à l’invitation du premier ministre a-t-elle définitivement mis fin aux tractations de la CUPAD  et à toute  possibilité de voir les deux camps  se parler?

 

Le FNDU a toujours appelé à un dialogue sérieux et franc pour sortir le pays de la crise multiforme dans laquelle il se débat depuis le coup d'Etat de 2008. Notre disponibilité est réelle et nous l'avons réitérée à maintes reprises. Toutefois, pour qu'il y ait un tel dialogue, il faut que le pouvoir soit, pour une fois, sérieux!

 

Quand il le sera, réellement, le FNDU n'aura d'autres conditions que celles déjà exprimées et auxquelles nous attendons toujours les réponses écrites promises par le pouvoir!

 

Pensez-vous que le pouvoir va tenir son dialogue sans l’opposition et à  quelle fin?   

 

Soyons clairs et honnêtes avec les citoyens mauritaniens! En plus de sept ans d'exercice du pouvoir, il est clair que le régime actuel accorde peu d'intérêt à l'apaisement du climat politique dans le pays. Ses priorités sont ailleurs, et bassement matérielles! Chaque fois qu'il a des soucis relativement importants, nés de la situation intérieure ou des pressions extérieures, il fait semblant de vouloir entamer un dialogue sérieux. Mais ce n'est que du bluff, juste pour gagner du temps. 

 

L'incurie du régime fait que tout devient théâtral  et que la forme importe plus que le fond. Je n'exclus donc pas que le pouvoir organise avec ses laudateurs et une certaine opposition, qui n'a d'opposition que le nom, un simulacre de dialogue. A quelle fin? Afin d'entretenir les illusions d'absence de crise politique. Quand un régime est irresponsable, comme celui que nous avons depuis 2008, il préfère différer la solution des problèmes de fond et s'échiner à brosser un portrait idyllique du pays, alors que tout le monde sait que ce n'est que mensonges et travestissements de la réalité. 

  

Certains pensent que le pays vit une situation économique difficile qui pourrait peut-être pousser  le gouvernement à lâcher du lest. Qu’en pense l’économiste que vous êtes ?

 

Effectivement le pays vit une situation économique très difficile et il s'est avéré que les chiffres mirobolants avec lesquels le régime et ses sbires nous cassaient les tympans, des années durant, ne sont que du "ramz elghoubari" comme on dit en Hassaniya. Mais nous ne sommes pas en présence d'un gouvernement responsable qui sait lâcher du lest quand il le faut!  D'ailleurs, le pauvre gouvernement n'y est pour rien, il ne faut pas l'accabler! Tout est entre les mains du chef de l'Etat qui ne comprend, malheureusement, que la logique du rapport de force et qui accorde peu d'intérêt à l'avenir, après lui, de notre pays!    

Propos recueillis par DL