55 années d’indépendance et le non-dit /Par Brahim Ould Boidaha

31 March, 2016 - 10:23

         Pour bien gouverner la Mauritanie, pays complexe et paradoxal par la nature de la composition de sa population, il faut nécessairement être armé d’une connaissance profonde de son peuple, connaissance teintée d’un sens psychopédagogique et humain pour  pouvoir espérer la réussite.

       Ce préambule idéaliste pour certains devient une obligation pour celui qui devient chef de l’Etat mauritanien par la force des choses. Est-ce que notre souci majeur et fondamental est de construire un Etat assurant notre avenir et celui de nos générations futures jusqu’à l’infini ? A-t-on besoin de bien gouverner pour atteindre cet objectif ou non ? Ou vivre sous le droit régalien ? Toutes ces questions sont posées avec acuité au peuple mauritanien, dans sa diversité naturelle, depuis le 28 novembre 1960 à ce jour. Et notre peuple en est totalement responsable dans sa globalité.

Cette responsabilité suprême implique un arbitrage juste, désintéressé à tout point de vue dans : l’éducation/santé/emploi / richesses  et pour y parvenir, il faut connaitre avec une certaine aisance les liens et les haines entre les tribus et les ethnies, ainsi que celles qui existaient entre elles, jusqu’au niveau des familles, elles-mêmes.

Ces points cardinaux doivent, pour le moins, être couronnés d’une planification durable dans le temps avec la possibilité d’apporter des correctifs au fur et à mesure de leur application et suivant l’évolution de leur stratégie nationale et celle de l’environnement international.

 

Ce quadrilatère structurel doit être à la fois le choix, la devise, l’objectif et une conscience nationale assise sur une base constitutionnelle inamovible de tout chef d’Etat mauritanien d’où il vienne. Cette notion fondamentale de compréhension d’un Etat est à la fois une obligation et un devoir national.

Cette couverture permet à celui qui devient, par hasard ou par la force des choses, chef de cet Etat qui se dit ‘’islamique’’, d’apprendre, s’il ne les connaissait pas les spécifications  caractérisant chaque composante de ce peuple hétérogène à gouverner. C’est là la clé de la réussite et celle de l’échec !!!.....

La négligence de tous ces aspects indispensables à tout gouvernant le place inévitablement à la merci d’une camarilla d’opportunistes sans foi, ni loi qui le captera  par des  manières obséquieuses pour le dévier de son objectif de bien faire. Ils abuseront sans scrupule de sa confiance dans leurs propres intérêts, choses courantes dans notre pays. Et peu importe pour elle, ce qui peut l’entacher par la suite. Ils sont sans âme humaine par nature. Nonobstant qu’ils s’enrichissent excessivement, compte-tenu de leur proximité de la haute hiérarchie par l’usage de l’influence et font la pluie et le beau temps dans le pays. Cette camarilla composite, dont les héritiers sont toujours en piste, constitue un important ensemble composé de : laudateurs rodés, flagorneurs peu timides, chansonniers ardus et des bouffons du roi qualifiés qui accueillent tous les Présidents mauritaniens entrant. L’expérience a démontré qu’aucun Président mauritanien n’a pu échapper à leur emprise. Et, par l’importance qu’ils acquièrent, ils deviennent une porte payante et courtisés par ceux qui veulent un poste important dans l’Etat ou un projet enrichissant.

’’ Tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute’'. C’est la faiblesse humaine innée dans certaines personnes’’ !!!.......

 

 

Erreur fatale

Ce savoir doit être étendu à tous les pays du monde auprès desquels la Mauritanie peut jouer ses intérêts stratégiques sur le plan international et se pourvoir d’un statut progressif respectable, promettant et rassurant politiquement et économiquement  son avenir dans le concert des nations.

Plus d’un demi-siècle d’indépendance constitue une période excessivement longue pour implanter ou établir des structures d’un Etat viable et instaurer un avenir durable, offrant la meilleure sécurité de vie aux générations futures et l’au delà. Certes, tout le temps nécessaire nous a été offert pour rôder convenablement les rouages de notre système organisationnel et opérationnel conduisant à l’harmonisation d’un cadre étatique inamovible qui garantit à la fois un système de fonctionnement stable et évite  les erreurs organisationnelles ou les improvisations des responsables profanes dans l’ordre fonctionnel des structures de l’Etat.

 Hélas, on est actuellement loin de cet idéal et nous vivons aujourd’hui le contraire de cet objectif à notre dépens, pourtant indispensable pour l’existence d’un Etat physique. Ceci devait être notre première préoccupation et notre souci permanent. Peut-on, hélas, se réconforter aujourd’hui de notre réussite ou  de notre échec dans ce domaine ?

 Depuis 1975,  Il est clair que nous naviguions à contre-courant parce que nous avons perdu tous nos repères politico-économiques et notre horizon est devenu un désert béant, malgré la découverte de richesses importantes.

 L’erreur au départ était notre engagement dans la guerre du Sahara sans moyens humains et matériels auxquels s’ajoute le changement subit d’alliance de notre politique régionale. Il faut avouer honnêtement que feu Mokhtar, avec son importante  expérience réussie à l’échelle internationale, a été roulé dans la farine d’une façon surprenante. ’’ L’œuvre de tant de jours, en un jour effacé’’.

 Et, le désordre que nous vivons aujourd’hui est né à partir delà.

Après ce prélude en guise de préambule qu’avons-nous réalisé durant cinquante cinq ans d’indépendance sur tous les plans : organisation structurelle d’un Etat, éducation, santé, emploi et distribution de la richesse ?

L’ampleur du sujet nous contraint à comprimer le développement à des observations succinctes sur des points saillants et marquants de l’évolution de notre pays, durant cette longue période d’expérience parsemée de hauts et de bas, d’enchevêtrement d’événements peu honorables parfois. Ce choix nous permet de commencer par une projection sur notre population, charnière et maitre d’œuvre du fonctionnement d’Etat.

Population : a/ bidhanes et b/ noirs

 L’orthodoxie d’un Etat dépend naturellement de la valeur intrinsèque de sa population et de ce fait, elle porte la responsabilité historique de sa réussite comme de son échec.

S’agissant d’une mosaïque humaine constituée de tribus bidhanes  et ethnies noires, chacune de ces franges est divisée en : guerriers, marabouts zwayas, Chourfas, haratines, griots, aznagas, forgerons et pêcheurs pour certaines.

Ces ensembles aussi variés que complexes sont de religion musulmane. L’arabe est la langue de leur religion et celle de leur communication avant l’occupation. Leur justice est assurée par des cadis en application de la Charia en conformité avec les préceptes de l’islam. Ils sont pétris dans leurs différentes traditions aussi variées que leurs propres compositions humaines.

Cette population éparse réside traditionnellement dans les quatre côtés du quadrilatère (cardinal) mauritanien : sud Trarza/Ehel Leguebla,  Est le grand Hodh/Ehel Charg, nord Tiris/Ehel Tell et ouest Nouadhibou_/Ehel Sahel. Ces quatre grandes régions étaient  sous la domination des Emirs,  hormis Ehel Sahel qui étaient tous des princes sans toge mais ils ont accepté à un moment donné la formule ‘ ‘’Eït- Arbine’’, J’amaâ qui prend en charge tous les problèmes de la tribu ou de la collectivité.

a/ elbidhanes : ces composantes arabes avec une dose importante de berbères étaient dominantes et mesuraient leur force entre eux dans toutes les régions et en excursion sporadique de guerre interrégionale entre tribus. Ceux qui ne sont pas versés dans le jihad réel en conformité avec leur Iman, ne se privaient guère  de piller ceux qui n’avaient pas d’armes.

 Là, il y a nécessairement un distinguo à faire car les victimes de cette barbarie ont gardé la haine et le mépris pour toujours pour tout le monde, particulièrement ceux que nous appelons ‘’guerriers.’’C’est une erreur historique grave parce que les jihadistes sont des grands croyants et ne se livrent pas à ce genre de péchés.  Au contraire, leur principe fondamental et cardinal est d’apporter secours aux faibles et aux nécessiteux. Cette interprétation a créé un différend entre les frères  Wajaha et Mouhamed Elmamoune, entrainant leur séparation dans l’objectif d’el jihad.

Dans la confusion totale, les victimes de ces atrocités ont édité des fatwas horribles en assimilant les deux cas de figure d’où l’appréciation globale et parfaitement injuste, portant un tort politico-religieux  et un préjudice, à ce jour, à des innocents ayant une protection divine.

 

Fils d’un moujahid de pur sang, je sais parfaitement de quoi je parle ! Mais, depuis l’indépendance, il se révèle par l’analyse des actes de gestion des gouvernants du pays  que ces haines et mépris sont plus orientés sur Ehel Sahel qu’ailleurs. Ce qui explique en partie que l’axiome, à ce sujet, était erroné préalablement. Delà, l’administration de notre pays est devenue partie prenante et exprime cette volonté par ses choix et ses actes dans ses décisions d’une façon, peu voilées.

 

Entorses graves à l’Islam

 

Si l’épilogue des comportements antérieurs et postérieurs à l’occupation coloniale de ces ensembles et durant la période d’indépendance, est  toisé en horizontal et vertical aux fins de trouver une synthèse globale permettant d’élucider une approche psychologique juste sur la population mauritanienne, il en sortirait les observations suivantes :

a-1- Elbidhanes qui président aux destinées du pays depuis l’indépendance se sont distingués par des méfaits inqualifiables commis par eux pour détruire définitivement les tissus : humain, économique et de la nature rurale dans tout le pays. Ci-dessous quelques exemples :

       a-1-1- sur le plan religieux, les analystes et les observateurs estiment que leur Iman est à peine au niveau de 7%. Récemment, Ould Sidi Yahya a confirmé que 90% des mauritaniens ne font que des péchés quotidiennement au cours d’une prêche à Nouakchott. La faiblesse de  l’Iman  dans la zone mauritanienne est également constatée par certains observateurs et donnent l’exemple d’Ould Haidalla qui a appliqué la charia conformément à la constitution stipulant  qu’on est une République Islamique. De ce fait, il a été renversé par un coup d’Etat et aussitôt, l’ambassadeur d’Israël a été installé au grand jour à Nouakchott, sans aucun geste d’hostilité de tous mauritaniens.

 Il s’y ajoute également les sévices qu’ont subis les plus grands érudits mauritaniens tels  Ould Sidi Yahya et Mohamed Hassan Ould Dedew. Tous ces actes contraires aux préceptes de l’Islam, aux principes d’une République Islamique et à sa constitution ont été accueillis avec allégresse, pour ne pas dire, fêtés comme la chute de Haidalla. Il en résulte que les tabous de l’islam et ses préceptes sont relégués à l’irrespect comme pain quotidien panaché de l’injustice et de l’exclusion sociales.

 On se trouve donc dans le droit de demander à quoi rime  l’appellation de la République Islamique ? Ces dépassements et rejet de charia par une bonne majorité des mauritaniens, constituent des entorses graves aux préceptes de l’islam et ouvrent désormais le pays au vandalisme de toutes sortes : aux vols, aux crimes et à toutes sortes d’atrocités. De ce fait, la Charia est enterrée définitivement en Mauritanie sans funérailles, ni regret. Où est donc notre Islam ou bien, c’est un islam de façade ou une duperie pour les autres ?

Les freins moraux sont lâchés par nous-mêmes. Et, c’est bien ce que nous vivons malheureusement aujourd’hui.

a-1-3- depuis l’indépendance, les métaphores de la nature ont confirmé leur mentalité de déprédateurs chevronnés en s’attelant à détruire :

a-1-4- tout le couvert végétal en brûlant les arbres verts et en déracinant d’autres végétaux pour faire du charbon de bois ou alimenter le bétail et la pratique persiste jusqu’à présent. Les marchés de charbon dans le pays en donnent le plus éloquent témoignage. Cette destruction de la végétation par l’abattage et la calcination  crée déjà une désertification avancée qui influe sur la pluviométrie d’où la sécheresse qui est devenue quasiment permanente avec son arsenal de dégâts sur le cheptel et l’appauvrissement de nos éleveurs.

 Ces ravages sur  l’environnement et la nature sont interdits dans le monde entier ainsi que le charbon de bois qui est remplacé par le charbon minéral.

a-1-5- à la même allure, les métaphores ont totalement décimé, par une chasse sauvage, toute la faune qui meublait et donnait une vie à nos zones rurales, à savoir : Gazelles, Autriches, mouflons, biches, outardes, pintades, antilopes, canards, lapins en voie de disparition avancée et beaucoup d’autres espèces.

a-1-6- pêche : depuis la mi- 1978, les amarres ont été larguées pour le pillage effréné de la plus grande richesse du pays qui présente l’avantage biologique exceptionnel de se renouveler. Les licences libres et les affrètements se distribuaient d’une façon sélective à la pelle et les débarquements se faisaient à Las- Palmas.

 C’était la ruée vers l’or de tous les laudateurs et les va-nu-pieds, constituant rapidement des mafias en association avec celles internationalement connues des pêches, ont tout saccagé. L’éclat de la richesse rapide de ces groupes inondait les bureaux de l’administration et les salons de Nouakchott.

Ils sont devenus les plus riches mauritaniens depuis à ce jour et sans manquer d’insolence qu’accompagne un certain orgueil non mérité à tout point de vue. C’est ce que nous pouvons appeler un crime économique en bonne et due forme. 

 Les échos de l’intolérable féria parvenus au Président Haidalla à une partie de cette époque décréta le débarquement des produits halieutiques à Nouadhibou, atténuant quelque peu ce ravage incroyable mais le contrôle de surveillance impliquée dans ce gâchis n’a pas suivi pour des raisons évidentes.

Ce pillage organisé a fait disparaitre pour toujours des espèces nobles de poisson de haute valeur, et constitue un crime économique dont seuls sont responsables ces groupes restreints et par leurs actes irresponsables. Ils ont créé un préjudice notoire, compromettant l’avenir de tous les mauritaniens. Il se confirme par la réalité de tous ces actes destructifs qu’elbidhanes en Mauritanie sont des déprédateurs attestés comme les crickets et les espèces de cette nature.

 Qui a été jugé pour ce crime économique national ? D’où une complicité nationale dans l’ombre de la puissance publique, bien sûr ! ..... 

a-1-7 : A toutes ces constatations, il faut ajouter qu’ils sont fortement atteints par la boulimie financière qui peut les amener à sacrifier leurs parents les plus proches, état d’esprit propre à certains mauritaniens.

 Seuls Ehel Sahel qu’on peut appeler désormais les mort-vivants et leurs confrères noirs n’ont pas participé à la destruction de cette économie essentielle du pays et ce, malgré que le Président était Haidalla pendant une partie de cette époque.

 L’exception de H’meida confirme la règle  dont la bonté généreuse a inondé tous les pans de la société mauritanienne. Haidalla a d’ailleurs brimé sévèrement son frangin que certains laudateurs voulaient utiliser comme couverture dans cette aventure du crime économique.

 

(A suivre)