Autour d'un thé

16 February, 2017 - 00:53

« Pour que rien ne reste sans qu’on ne le voie en Mauritanie ». N’y dit-on pas que « si les oreilles sont si petites, c’est que, chaque jour, elles entendent des choses nouvelles ». Y a pas que Trump qui communique par tweets, très controversés du reste. Même ici, chez nous, ça tweete à tout va, pour raconter des histoires comme on sait bien le faire. Vous savez, l’inspiration, quand on a bien mangé, c’est très facile. Un proverbe africain nous apprend qu’il est très facile d’être gentil avec l’argent des autres. Donner par ci. Recommander par là. Comme ça. A droite. A gauche. Dans tous les sens, même. Quand on monte, comme ça, au ciel, pfuiiit, ascension fulgurante ! Quand l’argent coule de partout, les voyages, les missions, les commissions… Oui, ça va très bien, ça peut bien aller. Quand on n’a pas un problème de cent ouguiyas, pour aller hors de sa maison, fuir le regard insupportable de petits gamins en haillons, ventre creux. « Ça va très bien », pour un ministre de l’Economie et des finances, ne veut pas dire grand-chose. Pour lui, ça va. L’économie aussi va, tant il confond sa personne à son administration. Les choses marchent. Il suffit juste d’un tweet pour le dire. C’est la mode que de publier des tweets pour dire des choses. Débiter des bêtises. « Ça va aller dans l’avenir », ce qui suppose que ça ne va pas dans le présent. Pas question de parler du passé. Tant que ça va là-bas, ça va ici. « Et, pourtant, ça marche ! » nous tweete notre Galilée national. Prémices d’une profonde mutation économique... Sans commentaires. Tu sais, chez nous, les anciens ne cessent de dire que le gouvernement ne fait jamais porter un pantalon à quelqu’un, sans qu’un jour, il ne le lui ôte. Combien de fois cette « houkouma »-là a ôté des pantalons à des hommes ou à leur faire porter la culotte, après leur avoir enfilé de très amples pantalons. Moi, je me demande comment quelqu’un qui était chef de quelqu’un redevient, subitement, son subordonné. Ce n’est pas que subordination ou chefferie veuille dire quelque chose. Mais c’est dégrader les gens. Dégrader est un terme purement militaire. Ça veut dire quoi ? Toi « engazé » militaire. Toi devenu gradé ; comme, par exemple, brigadier, sergent ou, même, lieutenant, voire capitaine. Puis un jour le chef, le grand chef décide de te dégrader. Et te voilà (re-)soldat de première ou de deuxième classe. Un militaire reste un militaire. Les idées sont rebelles. Les comportements aussi. Entre ministre et wali, c’est beaucoup de marches d’escalier. Quand tu en tombes, comme ça, sans faire attention, c’est très dur. C’est, directement, fractures, avec forts traumatismes. Ça veut dire que, désormais, général peut devenir caporal et que directeur du Trésor et de la comptabilité publique peut être envoyé comme percepteur à Djiguenni ; directeur général des douanes, en chef de poste à Touil ; ministre des pêches, muté chef division pêche artisanale au même département ; ministre de l’Economie et des finances parachuté trésorier régional de Nouadhibou ; directeur du cabinet du Président, surveillant général du collège de Gouraye ; ministre des Affaires étrangères, premier conseiller de l’ambassade de la Mauritanie en Guinée-Bissau ; porte-parole du gouvernement, préfet adjoint à Bassiknou ; Premier ministre, secrétaire général et particulier de la mairie de Zouérate et ministre de l’Intérieur et de la décentralisation, attaché de direction de l’administrateur directeur général de la SNIM…Les fonctionnaires sont comme des pièces de rechange : interchangeables. Tant que ça marche, c’est bon. Et puis, un ministre de l’Intérieur et un wali, c’est toujours dans la même gamelle. Tant que tu as un salaire, des frais de mission, des « choses à prendre pour toi ». Tant que tu es chef quelque part, avec une caisse, des entrées, des sorties. Tu mélanges ça avec ça, pour faire sortir quelque chose qui va vers toi. C’est bon. Le travail, c’est le travail. Aujourd’hui, en haut ; demain, en bas ; après-demain, entre le bas et le haut. Ainsi va la vie. Yo-yo, il ne sert à rien de faire le malin. Repos, garde-à-vous et repos : c’est tout simple… Salut.

Sneiba El Kory