Campagne électorale au Brakna : Echos

30 August, 2018 - 04:28

C'est aux environs de 16 heures ce mardi 21 août que le président Mohamed Ould Abdel Aziz est arrivé à Aleg en provenance de Rosso. Dès l'annonce de la visite, les autorités ont commencé à se démener comme d'habitude pour essayer de colmater les brèches pour tromper le président en lui faisant croire que tout va très bien: bonnes infrastructures et adhésion populaire aux éternelles orientations de la direction nationale. C'est depuis deux jours que le ministère de l'équipement à mobilisé ses équipes pour essayer de boucher les nombreux gros trous et nids qui jonchent le tronçon allant de l'aérodrome où va atterrir l'avion présidentiel jusqu'à la résidence du Wali sur une distance de quelques dizaines de kilomètres. Aussitôt arrivé, Ould Abdel Aziz est allé directement chez le wali. C'est à peine si quelques groupes rassemblés ici et là ont eu le temps de le saluer de loin. Reunion/injonction avec certains cadres et personnalités venus des quatre coins de la wilaya. Quasiment les mêmes instructions que celles données à Nema, Kiffa et à Rosso demandant de voter en faveur des candidats de l'Union Pour la République.

Ould Oudaa et Ould Issa déroutés
Au niveau d'Aleg, neuf listes se battent pour un fauteuil alors que quinze autres croisent le fer pour triompher d'au moins l'un des trois postes de député que la formule de la proportionnelle va départager sur la base d'un quotient électoral de 3500 pour un collège électoral qui dépasse la cinquantaine de mille d'électeurs. Seulement, la dernière volte-face présidentielle a faussé certains calculs électoraux, notamment du ministre de l'équipement, Mohamed Abdallahi Ould Oudaa et du charge de mission Alioune Ould qui ont respectivement présenté des listes Sursaut et Karama parallèles à celle de l'UPR en réaction au choix de celui-ci. Mais depuis qu’Ould Abdel Aziz a commencé à dire depuis quelques jours que tous les militants de l'UPR ne doivent voter que pour ses candidats, c'est véritablement la déroute. Relayant les propos de son président, le ministre du pétrole, qui coordonne la campagne de l'UPR au Brakna, a déclaré qu'il demandera à tous ceux qui parrainent des listes parallèles concurrentes à celles présentées par le parti au pouvoir de suspendre ces listes.

Soirée artistique
C'est le jeune secrétaire général du ministère de l'intérieur et de la décentralisation et maire d'Aleg, Mohamed Ould Soueidatt qui s'est chargé de toute l'organisation liée à la tribune: panachage et affichage de photos et de banderoles. Les organisateurs prévoyaient d'organiser le meeting et la soirée artistique. Finalement, la tribune n'abritera ni meeting ni soirée puisque le président à décidé de faire juste une réunion dans la résidence du Wali et que celui-ci a interdit la soirée pour des considérations sécuritaires.

Arrestation d'un militant d'IRA
Les autorités d'Aleg ont procédé aux environs de 17 heures à l'arrestation d'Ahmedou Ould Kharachi, grand militant de l'Initiative de Résurgence Abolitionniste  (IRA). Motif: le militant à arboré une chemise sur laquelle était écrit: Libérez Birame et marchait seul sur le goudron principal au moment de l'arrivée de Mohamed Ould Abdel Aziz. Les policiers prétendent avoir reçu des instructions d'arrêter Ould Kharachi qui n'est pas à son coup d'essai puisque cet instituteur professionnellement irréprochable et très compétent est connu pour être l'un des responsables les plus emblématiques et les plus courageux d'IRA au niveau du Brakna. Son arrestation constitue une preuve supplémentaire de la panique des autorités.

Suspension 
Le chargé de mission Alioune Ould Issa devrait normalement suspendre la liste aux législatives présentée au nom du parti Karama dirigée par son frère Youssef Ould Issa. De sources proches de l'UPR, Alioune Ould Issa qui était mécontent des choix du parti au pouvoir serait pressenti pour être désigné à l'un des quatre  postes des députés de l'étranger  (Afrique, Europe, Asie et Amérique). Ould Issa est un ressortissant de l'arrondissement de Male où il serait très populaire. Déjà en 2014 mécontent de ne pas avoir été choisi comme candidat à la mairie, il a présente une liste au nom du Sursaut qui a battu à plate couture celle de l'UPR.

Tous les moyens sont bons
Depuis quelques jours que le président Mohamed Ould Abdel Aziz s'investit personnellement à jouer au directeur national autoproclamé de la campagne de l'Union Pour la République. Visiblement, le lancement de plus d'une dizaine des ministres de son gouvernement dans la course aux prochaines élections ne semble pas le rassurer. Le spectre de la déroute du rejet des amendements constitutionnels par les sénateurs, que ni lui ni ses services de renseignement n'ont vu, venir le hante toujours. Alors pour cette fois, rien n'est laissé au hasard: avion présidentiel avec kérosène, voitures et argent public, mobilisation administrative et sécuritaire avec des walis, Hakems et grades de l'armée qui battent campagne. Rien ne sert à rappeler que les dispositions de la constitution d'abord et celles de la loi sur l'incompatibilité ensuite sont sans appel sur l'irrégularité des agissements du président et de son équipe. Même la justice joue sa partition. Les dernières mesures prises à l'encontre des biens des hommes d'affaires Mohamed Ould Bouamatou et Mohamed Ould Debagh dénotent de l'affolement du pouvoir qui veut user et abuser de tout pour assurer l'issue des élections législatives, municipales et régionales qui auront forcément leur après juste avant l'échéance très attendues de la présidentielle de 2019.

 

Ould Djay, le phénomène

Le tonitruant et très controversé ministre de l’économie et des finances Moktar Ould Djay ne se déploie pas trop dans cette campagne comme il l’a fait lors des dernières implantations à travers toute la région du Brakna. Ce qui lui a permis en tant que chef d’une importante alliance ministérielle de s’opposer à une autre forte tendance alignée derrière le général Mohamed Ould Meguett, un homme fort de l’aile militaire du pouvoir de Mohamed Ould Abdel Aziz. Après un bref passage au ministère de l’éducation en tant que chargé de communication imposé par Nebgouha Mint Mohamed Vall avec qui il travaillait dans un bureau d’études, le jeune statisticien aurait été recommandé à Aziz par l’ancien président de l’UPR Mohamed Yahya Ould Horma qu’il a impressionné au cours d’une réunion du parti à Magta Lahjar. Depuis lors, Ould Djay gravit vite les échelons et devient tour à tour directeur général des impôts connu pour ses exagérations surtout à l’encontre des opposants (hommes politiques et d’affaires)  contre lesquels il entreprend une véritable campagne de chasse aux sorcières fiscale qui dissuade beaucoup à rejoindre le camp de l’opposition pour préserver leurs intérêts et ne pas risquer la banqueroute. L’affaire du député Tawassoul, Mohamed Lemine Ould Seyidi est à ce titre suffisamment éloquente. Aux dernières implantations comme lors de la campagne des amendements constitutionnels de 2017, Oud Djay, devenu entretemps puissant ministre de l’économie et des finances, aurait claqué plusieurs centaines de millions voire plus pour se faire une place au Brakna. Dans l’arrondissement de Male par exemple, sa tendance remporte avec trente unités de base ‘’confectionnées ‘’ en quelques jours la sous-section de l’UPR contre celle du populaire Alioune Ould Issa nouvellement nommé chargé de mission à la Primature qui a battu sans appel l’UPR aux élections municipales de 2014. Lors de ces élections, il réussit à imposer son cousin et chargé d’affaires El Moustapha Ould Mohamed Ould Mahmoud comme candidat UPR à la présidence du Conseil Régional du Brakna et à candidater tous ses soutiens au niveau de toutes les mairies du département de Magta Lahjar où il est l’objet d’une forte contestation très clairement exprimée devant le président au cours de la réunion des cadres du Brakna organisée dans la résidence du Wali le 25 août dernier. Selon un cadre de la mairie de Bouhdida : ‘’ Pour cette fois, Ould Djay semble très occupé à gérer ses propres problèmes au niveau de sa moughataa. Pourtant s’il avait dépensé juste le cinquième de l’argent qu’il a sorti pour l’implantation, il aurait assuré sans risque l’élection des listes UPR (municipales et législatives) au niveau d’Aleg. Sauf s’il veut faire ‘’apparaître le soleil’’ sur son rival militaire considéré comme le parrain de la tête de liste des candidats à la députation d’Aleg’’.

 

Vous avez dit troisième mandat?
Répondant au cours de la réunion des cadres du Brakna à une requête lui demandant un troisième et un quatrième mandat, le président Mohamed Ould Abdel Aziz a déclaré : " ceux qui demandent un troisième et un quatrième mandat doivent nous donner une majorité écrasante pour réaliser nos projets". Avec cette déclaration, les choses deviennent de plus en plus claires. Comme en 2008, Mohamed Ould Abdel Aziz aurait probablement besoin d'un peloton parlementaire pour faire passer une réforme parlementaire et changer la constitution ou à la limite faire sauter les verrous constitutionnels limitant les mandats.

Réunion houleuse 
La réunion des cadres du Brakna avec le président Ould Abdel Aziz a été particulièrement houleuse. La rencontre a constitué une occasion pour les tendances par éléments interposés de se tirer à boulets s'accusant les uns les autres d'être responsables des déboires de l'Union Pour la République au niveau du Brakna. Dans cette polémique malsaine, la palme d'or est revenue aux intervenants de la Moughataa de Magta Lahjar dont les tendances politiques ne se sont pas fait de cadeau. De son côté, l'ancien fédéral du Brakna, l'inspecteur du Trésor retraité Mohamed Ould Diahloul à déclaré : " Monsieur le président nous sommes tous avec toi. Mais la commission de la réforme du parti dont deux membres sont du Brakna  (Ould Djay et Diallo Mamadou Bathia) a tout gâté. Ici, ces deux ministres n'ont fait que dans le clientélisme et la discorde. L'UPR va très mal. Votre présence ici en campagne en est la meilleure preuve".

Oudaa rassuré 
Dans son intervention devant plusieurs dizaines des cadres de l'UPR rassemblés dans la résidence du Wali du Brakna, Ould Abdel Aziz a "refroidi le coeur" du ministre de l'équipement, Mohamed Abdallahi Ould Oudaa en déclarant qu'au niveau de certaines circonscriptions électorales où il y a la proportionnelle comme Aleg, l'UPR peut présenter des listes parallèles à celles de l'UPR avec des partis de la majorité avec lesquels cette formation a passé des accords électoraux. Même si Aziz n'a pas cité ces formations amies, il faisait essentiellement allusion au Sursaut, Karama et  UDP entre autres. Alors si Ould Issa maintient sa liste Karama, les trois députés d'Aleg reviendront normalement respectivement à l'UPR  (candidat issu de Bouhdida et proposé par le Général Mohamed Ould Meguett) puis au Sursaut  (candidat issu d'Aghchorguitt proposé par Mohamed Abdallahi Ould Oudaa) et à Karama  (issu de Male frère d'Alioune Ould Issa). Comme ça, la candidate Lalla Mint Mbarek la seule vraie représentante de la ville d'Aleg sera  "astucieusement " déboutée. Une exclusion méthodique à senteur raciste pour perpétuer l'emprise de vrais faux cadres népotistes et manipulateurs qui veulent tout avoir à eux et à leurs proches faisant sien l'adage selon lequel: "Ce qu'on a pu avoir, que nos frères le trouvent "