L’Algérie et ses voisins : Une stratégie évidente de satellisation /Par Moussa Hormat-Allah, Professeur d’université, Lauréat du PRIX CHINGUITT

25 October, 2018 - 01:13

Le Calame entame à partir d’aujourd’hui, en exclusivité, la publication des bonnes feuilles du nouveau livre de M. Moussa Hormat-Allah, intitulé : «Conflit du Sahara : Dans le premier cercle de Driss Basri, l’ancien ministre marocain de l’Intérieur ». Ce livre sortira très prochainement.

 

Note de l’auteur

L’étude qui suit a été adressée concomitamment à SM le Roi Mohamed VI par le biais de M. Mohamed Yassine Mansouri, directeur général de la DGED et à SEM Mohamed ould Abdelaziz, président de la République par l’intermédiaire de M. Moulaye  ould Mohamed Laghdaf, alors ministre, secrétaire général de la Présidence.

Ce rendez-vous avec l’ancien premier ministre a été pris par mon frère et ami, M. Mohamed Yehdhih ould Mokhtar El Hassan, ancien ministre de l’Intérieur.

Dans l’intérêt bien compris des pays de la sous-région, d’autres études stratégiques ont été adressées, par la suite, aux deux chefs d’Etat précités.

 

L’ETUDE

Dans tout processus de décision, le recours à la prospective est devenu incontournable. Car la prospective favorise la prise en compte de l’avenir dans les décisions du présent. Elle permet d’anticiper les événements et de se faire une idée précise de l’évolution probable d’un évènement donné. Ce faisant, on peut ainsi envisager, à l’avance, les parades appropriées pour faire face à cet évènement. Ceci est d’autant plus important si cet évènement peut menacer l’avenir ou le devenir d’un ou plusieurs Etats.

Dans cette optique, et au-delà des contingences du présent, il est permis de réfléchir sur ce que seront, demain, les rapports de l’Algérie avec ses voisins.

Cette projection dans le futur doit, naturellement, se faire sur la base d’éléments d’appréciation géopolitiques et géostratégiques précis ou prévisibles. Dans le cas d’espèce, c’est-à-dire celui de l’Algérie, on devra prendre en compte tous les paramètres présents ou à venir à partir de la vision que l’on s’en fait à Alger.

 

 

 

  1. L’hégémonisme algérien : une revanche sur l’adversité

Est-il besoin de rappeler cette vérité élémentaire : tout Etat a, en principe, une stratégie pour conduire sa politique étrangère et assurer, le cas échéant, sa présence et son rayonnement dans sa zone d’influence.

 

Du reste, la volonté d’hégémonisme de l’Algérie est revendiquée et assumée officiellement. A ce sujet, on se rappelle le fameux discours du président Boumediene où il a martelé avec vigueur : « Tout ce qui se passe entre Le Cap et Le Caire doit avoir l’aval d’Alger ».

En clair, Boumediene assigne à l’Algérie un objectif précis : le leadership panafricain.

Il va sans dire, que si on est animé par une telle volonté de leadership continental, on doit, en toute bonne logique, avoir la même ambition sur le plan sous-régional.

Par-delà les longues et douloureuses périodes d’occupation notamment turque et française, les velléités d’hégémonisme de l’Algérie sont, probablement, nées de deux événements qui ont marqué l’histoire récente de ce pays. Ces événements ont traumatisé les Algériens et ont forgé, dans la douleur, la conscience collective de ce peuple.

Au premier chef, les massacres de Sétif dans le Constantinois algérien en 1945 où les forces françaises ont exécuté de sang-froid plus de quarante-cinq mille algériens (45.000) à la suite d’une manifestation pacifique pour réclamer l’indépendance du pays.

Traumatisé par la vue de ce spectacle macabre, l’écrivain algérien Kateb Yacine, alors lycéen témoigne : « C’est en 1945 que mon humanitarisme fut confronté pour la première fois au plus atroce des spectacles. J’avais vingt ans. Le choc que j’ai ressenti devant l’impitoyable boucherie qui provoqua la mort de plusieurs milliers de musulmans, je ne l’ai jamais oublié. Là se cimente mon nationalisme(…) ».

Au lendemain de ces massacres, les chefs historiques du FLN entrèrent en dissidence et prirent le maquis. D’abord Krim Belkacem, suivi peu après par Aït Ahmed, Ben Bella…

Le deuxième évènement marquant, est la débâcle de la jeune armée algérienne en 1963 lors de la guerre des sables qui l’opposa à l’armée marocaine.

Pour conjurer ce passé traumatisant, l’ANP (l’Armée Nationale Populaire) s’est assignée pour mission de s’ériger en rempart pour que les Algériens ne revivent jamais plus Sétif ou Hassi Beïda. Ce qu’ils appellent communément la « Hougra ».

Source de fierté nationale et symbole d’une revanche sur l’adversité, l’ANP est une institution vénérée où se reconnaissent tous les Algériens.

L’Etat lui a accordé une priorité absolue pour la mettre dans des conditions optimales de combat en cas de conflit.

On a calculé qu’entre 2000 et 2015, ses seuls achats d’armement se sont élevés à 150 milliards de dollars et ce, à raison d’une moyenne de 10 milliards de dollars par an.

Selon le rapport publié le 18 mars 2013 par l’institut d’études stratégiques de Stockholm, l’Algérie a fait son entrée parmi les 6 pays importateurs majeurs d’armes au monde.

Bien qu’elle ait diversifiée ses sources d’approvisionnement, l’Algérie est restée, par ailleurs, le leader en Afrique du Nord et au Moyen-Orient en matière d’acquisition d’armement russe.

Nous donnerons plus loin, un aperçu sur cet impressionnant arsenal militaire algérien. Mais déjà une double question vient tout de suite à l’esprit : L’Algérie veut-elle se défendre contre qui ? Ou, à l’inverse, l’Algérie veut-elle attaquer qui ?

A la première question la réponse est aisée. L’Algérie pourrait vouloir se défendre contre ses voisins.

On conviendra facilement que ni la Tunisie, ni la Mauritanie, ni le Mali, ni le Niger, ni la Libye ne peuvent constituer pour elle aucune sorte de menace. Chacun de ces Etats a déjà procédé avec elle à la ratification et au bornage des frontières communes. Ce sont, de surcroit, des pays qui se trouvent, pour la plupart, dans la mouvance d’Alger.

Reste le Maroc. Alger est bien conscient que les rapports de force militaire –sur le papier – avec Rabat sont largement en sa faveur bien que le Maroc dispose d’une puissante armée avec des officiers de grande valeur. Du reste, Hassan II a déjà répondu, sous forme de boutade, à cette question : « On n’a jamais vu une Monarchie menacer une République ».

Il faut souligner que les deux pays n’ont pas accordé le même intérêt à leur armement. En schématisant, on peut dire que le Maroc s’est occupé de son développement économique sans se soucier outre mesure de la protection de son territoire. L’Algérie, pour sa part, s’est occupée de la protection de son territoire sans se soucier outre mesure de son développement économique.

 

Pas de méprise. Par sa puissance militaire inconsidérée, l’Algérie vise un double objectif : s’imposer certes comme une superpuissance africaine mais surtout imposer, dans la foulée, son diktat au Maroc en vue d’une nouvelle redistribution des cartes sur le plan géopolitique. Pour ce faire, la stratégie d’Alger est simple : affaiblir durablement le royaume chérifien, son rival potentiel et, accessoirement, fragiliser ses autres voisins notamment la Mauritanie et le Mali. Mais au fait, l’Algérie a-t-elle les moyens militaires de son ambition ?

 

 

  1. L’ANP : des moyens humains et matériels qui dépassent largement les besoins de défense de l’Algérie

 

Selon le très sérieux Global Fire Power, le site spécialisé dans l’armement des grandes puissances militaires mondiales, l’Algérie possède la deuxième armée la plus puissante d’Afrique et du monde arabe, juste derrière l’Egypte et avant l’Afrique du Sud. Dans son classement de 2015, le Global Fire Power détaille l’arsenal militaire algérien : 448 avions de combat (dernière génération), 975 chars de combat (neufs), 60 navires de guerre…

Global Fire Power révèle aussi que l’Algérie dépense en moyenne, 10 milliards de dollars par an pour ses achats d’armement.

Si l’arsenal militaire algérien est impressionnant, les effectifs de l’ANP le sont tout autant. Selon cette même publication de référence citée plus haut, l’armée algérienne compte 512.000 militaires de carrière et 400.000 réservistes. En gros, un million de soldats entre actifs et réservistes. Les 512.000 militaires de carrière sont répartis comme suit :

  • Les effectifs des 3 armées (terre, air et mer) (255.000)
  • Les effectifs de la Gendarmerie nationale (180.000) ;
  • Les effectifs des forces autonomes dites de « Défense aérienne du territoire » auxquels s’ajoutent les effectifs du Département du renseignement et de la sécurité et ceux de la Garde républicaine (77.000).

Rappelons, au passage, que la population totale de l’Algérie avoisine les 40 millions. L’Algérie est le deuxième pays arabe le plus peuplé après l’Egypte. Par ailleurs, avec la partition du Soudan, l’Algérie est devenue le plus grand pays d’Afrique, du monde arabe et de tout le bassin méditerranéen.

 

Ces effectifs de l’armée algérienne sont d’autant plus impressionnants que l’ANP ne compte plus dans ses rangs que des soldats de métier. En effet, depuis le début des années 2000, l’Algérie a opté pour la professionnalisation des armées et l’abandon de la conscription. L’Algérie a remédié ainsi à ce qui était naguère le talon d’Achille de l’ANP. Il est bien loin le temps où celle-ci était constituée de maquisards sans grande expérience du combat, avec un armement rudimentaire.

Il n’est pas question ici de faire une étude exhaustive de l’arsenal militaire algérien. Des centaines de pages ne suffiraient pas pour le détailler.

Aussi, nous nous contenterons d’en donner un aperçu, à titre indicatif.

 

  1. L’armée de l’air :
  • Avions de combat :

Tous les instituts d’études stratégiques : Stockholm, Londres, Washington…sont unanimes pour dire que l’Algérie dispose de plus de 450 avions de combat dernière génération. L’armée de l’air algérienne est équipée d’avions de combat essentiellement russes : SU-34, SU-30MK, SU-30 MS, MIG 29, MIG 31, …

Ces aéronefs, fleurons de l’aviation russe, ont été achetés pour remplacer les vieux SU-24 et autres MIG déclassés.

L’armée de l’air algérienne dispose aussi d’avions espions (rayon 3000 kms), de drones et de stations d’écoutes et de détection très sophistiquées pour la surveillance du territoire national avec un système d’alerte qui prévient de toute violation des frontières.

 

  • Hélicoptères et avions militaires de transport :

L’armée de l’air algérienne dispose de centaines – je dis bien de centaines – d’hélicoptères de combat et d’hélicoptères de transport lourd. Elle dispose, par ailleurs, d’une cinquantaine d’avions de transport gros porteurs de matériel et de troupes de divers types…

L’Algérie possède aussi des avions ravitailleurs…

 

  • Missiles balistiques :

L’Algérie dispose d’un grand nombre de rampes de lancement de missiles balistiques SCUD (mobiles ou fixes) d’une portée de 1000 kms.

 

Certains responsables algériens affirment, en privé, qu’ils ont les moyens militaires de mettre le Maroc à genou sans qu’aucun soldat de l’ANP n’ait franchi la frontière commune. Ils expliquent ainsi que toutes les grandes villes marocaines de Tanger à Laayoune en passant par Fès, Rabat, Casablanca, Marrakech ou Agadir sont à la portée de leurs missiles balistiques SCUD (mobiles et fixes), sans parler de l’appoint de leurs sous-marins, tapis dans les profondeurs de la Méditerranée et de l’Océan atlantique.

En dehors de cette menace potentielle sur les grandes agglomérations, ces responsables algériens affirment aussi être en mesure de détruire l’économie marocaine en attaquant toujours à partir de l’Algérie et par les mêmes moyens les principaux sites stratégiques du royaume : barrages, ports, aéroports, centrales électriques, dépôts de carburants, etc.

Dans la foulée, on affirme aussi à Alger qu’en cas de conflit avec le Maroc, la psychose qui s’emparera ainsi des populations marocaines sera leur principal allié. Avec l’espoir d’une fragilisation du régime provoquée notamment, selon eux, par des troubles sociaux, une montée probable de certains périls qui couvent : intégrisme religieux, velléités sécessionnistes de certaines régions du royaume et autres menaces internes diffuses.

  • Missiles de défense aérienne :

Outre toute la panoplie classique de missiles conventionnels de défense anti-aérienne, l’Algérie s’est dotée de nouveaux missiles russes d’une efficacité redoutable. Il s’agit des S-300 et des S-400. Après les S-300 acquis en 2011, l’Algérie a acheté à la Russie des missiles S-400.

«Le S-400 est un système de défense antiaérienne et antimissiles mobiles. Ces systèmes sont composés de missiles de défense aérienne de moyenne portée qui peuvent être déployés à une large échelle. Ils sont capables de guider 72 missiles engagés contre 36 cibles simultanées dans un rayon de 400 kms et d’abattre toutes cibles aériennes, avions, missiles de croisière ou de drones jusqu’à une altitude de 30 kms.

Pour les Occidentaux, le S-400 est le meilleur missile de défense aérienne au monde. Il est largement supérieur à son concurrent américain, le fameux missile anti-missile Patriot PAC3. On le surnomme le super-Patriot russe.

La portée du S-400 est de 400kms (soit le double du Patriot américain) et peut atteindre une altitude de 30kms.

Le S-400 peut intercepter des missiles d’une portée de 3.500 kms, jusqu’à des vitesses de plus de Mach 15. Le système S-400 peut également tirer un missile plus léger, conçu pour l’interception des missiles de croisière, volant à basse altitude. »

Pour montrer la redoutable efficacité des S-400, il faut se rappeler qu’au moment où la Russie s’apprêtait à vendre ces missiles à l’Iran, les Etats-Unis ont tout fait pour faire échouer cette transaction. Ils sont même allés jusqu’à faire, en guise de compensation, d’importantes concessions en faveur de Moscou.

Car Washington est bien consciente qu’avec les S-400, les espaces aérien, terrestre et maritime de l’Iran deviendront inviolables. Et le programme nucléaire iranien pourra alors se poursuivre en toute impunité et les menaces récurrentes israéliennes de détruire les sites nucléaires iraniens relèveraient alors du domaine des vœux pieux.

Il faut rappeler que la ville de Moscou et les sites stratégiques en Russie sont protégés par des batteries de missiles S-400.

Outre, les S-300 et les S-400, l’Algérie dispose aussi de missiles TOR-M2 et BUK-M2, lesquels sont tout aussi redoutables que les S-400.

« Le système tactique TOR-M2 assure la protection des sites d’importance stratégiques contre les frappes de missiles antiradars, de croisière, de drones, de bombes guidées, d’avions et d’hélicoptères. Le système TOR-M2 n’a pas d’équivalent au monde.

Une batterie de missiles TOR-M2 comprend quatre rampes de lancement mobiles capables d’abattre 16 cibles évoluant de tous côtés à une vitesse de plus de Mach 2 à une distance de 12 kms et à une altitude de 10 kms. Ce système est opérationnel par tout temps, de jour comme de nuit ».

Avec les systèmes, S-300, S-400, TOR-M2 et BUK-M2, tout le territoire national algérien, villes et sites stratégiques, est complétement à l’abri de toute attaque aérienne, maritime ou terrestre d’où qu’elle vienne.

A ce sujet, Menadéfense écrit : « La défense aérienne du territoire algérien a connu une véritable révolution ces dix dernières années, propulsant l’Algérie dans la catégorie des pays les plus en avance dans le domaine ».

Tous ces missiles y compris les missiles balistiques SCUD sont déployés essentiellement dans la 2ième région militaire (Oran) et la 3ième région militaire (Béchar) qui abrite la 250e compagnie de missiles de défense anti-aérienne longue portée. En d’autres termes, ces missiles sont pointés vers le Maroc, le Sahara et la Mauritanie, théâtres potentiels d’un conflit armé.

  1. La marine de guerre :

L’Algérie possède 60 navires de guerre et attend la livraison prochaine de 26 autres. Soit au total une armada de près de 100 navires de guerre.

La marine algérienne dispose d’un navire-amiral – ce qui est rare pour un pays en développement avec toute son escorte habituelle de sécurité et de ravitaillement.

Elle dispose aussi d’un porte-hélicoptères, de dizaines de frégates, de corvettes équipées de missiles SS-N, de vedettes, de lance-missiles (SSM Styx), de lance-torpilles, de dizaines de patrouilleurs de tous types, de dragueurs de mines, etc.

Les bâtiments de la marine de guerre algérienne sont équipés de missiles antimissiles.

L’Algérie a acheté à l’Italie un bâtiment de projection de type San Giorgio. Ce bâtiment peut mener des opérations amphibies, de soutien logistique et pourra même servir de plate-forme anti-sous-marins.

 

La marine algérienne dispose aussi de :

  • 6 sous-marins de type Kilo :
    • 2 Class Kilo 877 EKM
    • 4 Classe Kilo 636 M
  • D’embarcations de débarquement ;
  • De bombardiers SU-24 MK pour les missions de soutien
  • De SU-30 et B-200 T pour les missions de reconnaissance ;
  • D’hélicoptères Ka-32, utilisés notamment pour la détection de sous-marins ;

La défense côtière est équipée de batteries mobiles CSS-C-2 et de batteries mobiles Kh-35 E.

La marine de guerre algérienne dispose de systèmes IFF permettant de différencier les appareils amis et ennemis, qu’il s’agisse de navires ou d’avions de combat…

Parlant de la marine de guerre algérienne, les experts de l’OTAN affirment à l’unisson que la « La flotte algérienne devra être prise au sérieux en Méditerranée ».

 

  1. L’armée de terre :

L’armée de terre algérienne dispose d’une panoplie d’armements qui va du simple fusil d’assaut au missile le plus sophistiqué et du simple transport de troupes blindé aux chars de combat les plus performants.

Bien qu’officiels, les chiffres qui suivent datent de 2011 et sont probablement bien en deçà de la réalité car les Etats, secret défense oblige, ont une propension à minorer leur arsenal militaire.

En dehors des 975 chars neufs cités plus haut, l’armée de terre algérienne possède d’autres chars de combat de différents types :

  • 6OO chars T-90
  • 500 chars T-72
  • 300 chars T-62
  • 200 chars T-55…

L’Algérie a fait don au Polisario de beaucoup de matériel militaire reformé comme les chars T-52, T-62, pièces d’artillerie…

L’armée de terre algérienne possède 685 véhicules de transport de troupes de type BM P-1 et plus de 1200 autres véhicules de transport de troupes de différents types.

Elle possède aussi des milliers d’automitrailleuses, de lance-roquettes multiples, de pièces d’artillerie, de mortiers de différents types et de différents calibres. Elle possède également 500 blindés anti-aériens ZSU-23-3 et autres.

L’armée algérienne a passé, par ailleurs, en août 2013 deux commandes, l’une pour l’acquisition du fameux BMPT Terminator et l’autre pour l’acquisition de chars T-90 SA.

« Le BMPT (Terminator) est le premier blindé destiné uniquement à la protection des blindés. Aucun autre blindé au monde n’est spécifiquement conçu pour assurer ce type de mission ».

Le Terminator est appelé : « garde du corps des chars ». Il est doté d’un blindage spécial et est armé notamment de lasers.

Enfin, il faut noter que le génie militaire algérien possède d’énormes moyens logistiques.

  1. L’Algérie crée sa propre industrie d’armement pour faire face à tout éventuel embargo sur les armes

Nous venons de faire une énumération non exhaustive de l’armement algérien. Mais le point le plus important à souligner, c’est que l’Algérie a créé sa propre industrie nationale d’armement.

En effet, dès 1980, l’Algérie a élaboré une stratégie pour assurer l’autonomie de l’ANP par rapport à l’étranger. Alger veut ainsi éviter toute dépendance de l’étranger notamment en cas d’embargo sur les armes comme ce fut le cas lors de la guerre civile en Algérie en 1991 après que la victoire électorale du FIS fut annulée par l’armée.

Avant 2000, l’industrie militaire algérienne était modeste et non concurrente. L’ANP produisait sur place des équipements militaires légers sous licence russe et chinoise. Depuis, les choses ont bien changé. La production locale de l’armement est assurée par la Direction des Fabrications Militaires (DFM).

Dans les usines de la DFM, on produit différents types de matériel et d’équipements militaires :

  • « Pistolets mitrailleurs, fusils à pompe, fusils mitrailleurs, pistolets automatiques, pièces de rechange et d’outillages…
  • Paratonnerres, groupes électroniques, stands de tirs, matériel d’intendance, matériel paramédical,…
  • Grenades, mines antichars…
  • Véhicules de transport de troupes (BCL M-5), véhicules blindés de combat d’infanterie qui sont fabriqués à la Base centrale de logistique dans la ville de Blida.
  • Remorques porte-engins, camions-ateliers, camions frigorifiques, moyens d’emport et de stockage d’eau et de carburant, camions anti-incendie…
  • Avions légers biplace (FErnas-142), avions légers quadriplace (Safir-43),…fabriqués par l’entreprise aéronautique non loin de la ville d’Oran.
  • Drones. Les drones algériens sont du type HALE (haute altitude, longue endurance). Ils peuvent voler à une altitude de 7000 mètres avec une autonomie de 36 heures.
  • Corvettes Classe Djebel Chenoua et patrouilleurs Classe Kébir, fabriqués pour les besoins de la Marine nationale algérienne à la base navale de Mers el-Kébir, dans la banlieue d’Oran. Mers el-Kébir, il faut le rappeler, est la plus grande base aéronavale de la Méditerranée.
  • Matériel électronique de dernière génération, à usage sécuritaire et militaire, des appareils de communication tactiques et des radars de détection et de surveillance, fabriqués par l’usine de la Société Commune Algérienne de fabrication de Systèmes Electroniques (Scafse) basée à Sidi Bel Abbés. »

Pour promouvoir davantage son industrie militaire, l’Algérie a signé des accords de partenariat avec plusieurs pays…

 

 

  1. Pour l’observateur averti, Alger prépare déjà la guerre

Avec les développements qui précèdent, on a pu se faire une idée sur l’imposant arsenal militaire dont dispose l’ANP. Il va sans dire que cet arsenal dépasse largement les besoins de défense de l’Algérie. Dès lors, une question s’impose tout naturellement : Pourquoi tant d’armes ?

Nous avons déjà, au début de cette étude, donné un commencement d’explication à ce phénomène.

Quand on consent tant de sacrifices et qu’on investit tant d’argent dans une affaire déterminée, c’est qu’on a bien un objectif précis à atteindre. Cet objectif est du reste connu. Pourquoi alors continuer à tourner autour du pot ? D’autant que les velléités d’hégémonisme de l’Algérie sont désormais un secret de polichinelle.

Les gouvernements algériens eux-mêmes ne s’en cachent plus. Tout l’arsenal militaire algérien est mis au service d’un seul objectif : la grandeur et le rayonnement de l’Algérie.

L’Algérie cherche ainsi à imposer son diktat à l’ensemble des pays de la sous-région. Pour Alger, ces pays doivent se placer, bon gré, mal gré, dans sa mouvance.

Dans cette optique, le Maroc, la Mauritanie, le Mali….sont voués à devenir de simples wilayas où tout ce qui est important doit être décidé à partir d’Alger, la nouvelle métropole.

L’affaire du Sahara pourra être la carte maîtresse dans la stratégie de l’Algérie. Cette stratégie est, probablement, axée autour de deux points :

  1. Affaiblir durablement le Maroc d’une part et, d’autre part, fragiliser la Mauritanie et le Mali.
  2. Par Polisario interposé, fédérer sous la bannière de l’Algérie tous les Maures de la sous-région. On verra plus loin comment.

Mais avant de poursuivre, une brève digression. L’auteur de ces lignes n’a aucune animosité ni envers l’Algérie ni envers le Polisario. Il a une immense admiration pour la lutte héroïque menée par le valeureux peuple algérien pour son indépendance.

Quant au Polisario, il y compte certains amis dont des membres fondateurs de ce mouvement. Il a même un lien de parenté avec son chef, M. Brahim Ghali dont la grand-mère est une cousine, issue de la tribu des Oulad Ebeïri.

Sur un plan personnel, on peut être pour ou contre la cause sahraouie. Mais là n’est pas la question. C’est dire que l’unique  objet de cette étude et de celles qui suivront n’est rien d’autre que de mettre en exergue toutes les données du conflit du Sahara pour l’appréhender dans ses multiples dimensions : militaire, politique, sociologique et culturelle afin de lui trouver une solution consensuelle qui agrée toutes les parties. Cette parenthèse refermée, reprenons le cours de nos développements.

 

  1. Installer le Polisario au Sahara est, probablement, le point focal dans la stratégie d’Alger

S’agissant du Maroc, les stratèges algériens pensent que la situation au Sahara de « ni paix ni guerre » qui dure depuis 40 ans, a rendu exsangue l’économie marocaine. La course effrénée à l’armement qu’ils ont imposé à coups de milliards de dollars, ne permet pas au royaume chérifien de suivre. Pour eux, la situation est à présent propice à un dénouement en leur faveur. Comment ?

En provoquant directement ou indirectement une étincelle qui pourra mettre le feu aux poudres. Cette étincelle pourra venir, soit à la suite d’un incident frontalier entre le Maroc et l’Algérie où chaque partie rejetterait la responsabilité sur l’autre, soit par une reprise des hostilités entre le Maroc et le Polisario au Sahara avec, comme à Amgala en 1976, l’engagement de l’ANP aux côtés des Sahraouis.

La perte éventuelle du Sahara constituerait alors une nouvelle donne géopolitique qui servira de fer de lance à la stratégie d’Alger dans la sous-région.

D’autant que les Algériens pensent qu’une fois le Polisario installé au Sahara à la faveur d’une victoire militaire algérienne sur le terrain, le Maroc se retrouverait alors en porte-à-faux avec le Droit international, car pour l’ONU, le Sahara n’est pas une partie intégrante du royaume.

D’autre part, les Algériens sont aussi conscients qu’en cas de conflit armé entre le Maroc et l’Algérie au Sahara, les risques d’une intervention étrangère française, américaine ou autre en soutien à Rabat, sont quasi nuls. Pourquoi ?

Cette intervention – si tant est qu’elle puisse être envisagée – ne pourra se faire que de deux façons : soit à la suite d’une résolution du Conseil de sécurité dans le cadre du chapitre 7 de la charte de l’ONU, soit à la suite d’une action militaire unilatérale qui transgresserait la légalité internationale. Dans un cas comme dans l’autre, elle a de faibles chances d’aboutir.

Dans le premier cas, celui du Conseil de sécurité, le véto russe en faveur de l’Algérie sera acquis d’office. Car l’Algérie est le premier acheteur d’armes russes en Afrique et au Moyen-Orient et l’on sait que l’acquisition d’armement équivaut, dans la pratique, à un soutien politique et diplomatique, au pays client. Surtout, s’il s’agit d’un client, en l’occurrence l’Algérie, qui a déjà acheté chez son fournisseur russe pour des centaines de milliards de dollars d’armes.

Dans le deuxième cas, celui d’une éventuelle intervention armée menée de l’étranger, il faut tout de suite dire que celle-ci est peu probable pour deux raisons : d’abord, il n’y a aucun enjeu stratégique majeur pour l’Occident ; deuxièmement et surtout, son prix en vies humaines sera très élevé.

Car avec les systèmes S-300, S-400, TOR-M2 et BUK-M2, tout le territoire algérien, villes et sites stratégiques, est en principe, complétement à l’abri de toute attaque aérienne, maritime ou terrestre d’où qu’elle vienne.

Enfin, il faut noter que l’accord de défense qui lie le Maroc et la France ne pourra pas être mis en œuvre car Paris se retrouvera en porte-à-faux avec la légalité internationale mais aussi et surtout, son coût en vie humaines sera très élevé pour la partie française.

C’est dire que les belligérants – Maroc et Algérie – seront livrés à eux-mêmes et seul le rapport des forces sur le terrain déterminera l’issue de la guerre.

Les Algériens affirment, en privé, qu’en cas de conflit armé avec le Maroc, la monarchie sera fortement ébranlée. Car le consensus national autour de l’affaire du Sahara est le ciment de l’unité autour du Roi.

Pour les Algériens, le Maroc a annexé le Sahara au mépris du Droit international et quelques grands que soient les investissements et les infrastructures qu’il a réalisés dans l’ancienne colonie espagnole, ou le nombre de Marocains qu’il a installés sur place, cela ne lui confère nullement un titre de propriété sur ce territoire.

Pour les Algériens, le Sahara appartient aux Sahraouis et ils ont la ferme intention, le moment venu, de les y installer même au prix d’une deuxième guerre des sables qu’ils pensent remporter facilement.

  1. Le plan algérien ?

Mais pas de méprise. En installant le Polisario au Sahara, il va sans dire que les Algériens cherchent à instrumentaliser les indépendantistes sahraouis pour servir leur propre dessein dans la sous-région. Avec un objectif : reléguer le Maroc au second plan et fédérer, à terme, les Maures des pays voisins et les placer dans le sillage d’Alger.

Au Nord, on expliquera aux Maures de Goulimine, Tan-Tan et Assa Zag – provinces sous souveraineté marocaine incontestée – que leur avenir est indissociablement lié avec celui de leurs frères du Sud. Et que le chamboulement géopolitique qui vient d’avoir lieu dans la sous-région leur ouvre de nouvelles perspectives…

Par ailleurs, il n’est pas exclu, que le Polisario fort du soutien militaire et diplomatique de l’Algérie, aille jusqu’à revendiquer ces provinces arguant que le Sahara s’arrête aux contreforts de l’Atlas, c’est-à-dire à Bizakaren et que, par conséquent, Goulimine, Tan-Tan et Assa Zag sont des entités sahraouies.

Au sud, c’est-à-dire en Mauritanie, les Algériens pensent que les choses pourront aller beaucoup plus vite. L’Algérie, par Polisario interposé, installera, vraisemblablement, à Nouakchott un régime pro-indépendantiste sahraoui.

D’autant, qu’il y a déjà un douloureux précédent. Dans ses mémoires, l’ancien président Haïdalla révèle que si les plans de El Ouali, le leadeur sahraoui qui attaqua Nouakchott à la tête d’une puissante colonne du Polisario en 1976 avaient réussi, le Polisario et l’Algérie allaient placer un mauritano-sahraoui – dont il a cité le nom –, à la tête de l’Etat mauritanien.

Ce personnage, - Ahmed Baba Miské – cité nommément par Haïdalla, jouera, plus tard, selon plusieurs témoins un rôle de premier plan dans la préparation du coup d’Etat de juillet 1978.

Alger cherchera, probablement, par ailleurs, à soudoyer à coups de millions de dollars tous les responsables mauritaniens qui l’accepteront : officiers de l’armée, notables, hommes d’affaires, membres de la société civile, médias…

L’Algérie pourra aussi procéder à des investissements colossaux sans précédent en Mauritanie, probablement, 5 à 10 milliards de dollars. Ce qui ne manquera pas d’avoir un impact sur la vie de tous les jours : baisse des prix, amélioration sensible du pouvoir d’achat…dans l’espoir que cela pourra lui conférer une certaine adhésion populaire.

Mais la pérennité de ce régime pro-sahraoui installé à Nouakchott sera assurée, in fine, grâce à un rapport de force militaire. Car les nouveaux « gouvernants » mauritaniens pourront à tout moment, faire appel au soutien militaire de leurs frères sahraouis. Ce background revêt, déjà à lui seul, une importance psychologique capitale. Sans oublier l’épée de Damoclès que constituent, pour la Mauritanie les mouvements islamistes qui, au-delà des apparences, restent proches d’Alger et peuvent, à tout moment, déstabiliser le pays.

L’Algérie pourra aussi chercher à exacerber les facteurs de discorde et de division qui menacent l’unité nationale…Elle n’a pas hésité d’user de tels moyens par le passé.

A ce sujet, il faut se rappeler, les propos particulièrement menaçants que tint alors le président Boumedienne au président Mokhtar Ould Daddah lors de leur houleuse entrevue le 10 novembre 1975 à Béchar. C’était à la veille de la signature des accords de Madrid sur le partage du Sahara entre le Maroc et la Mauritanie.

Boumedienne somma alors Mokhtar de retirer sa délégation de Madrid et de ne pas signer l’accord en préparation. Et le président algérien d’ajouter : « Sinon les conséquences seraient graves et pour ton pays et pour toi-même ».

« Méfie-toi, Mokhtar ! La Mauritanie est un pays fragile. Elle a des problèmes intérieurs graves. Elle a plusieurs milliers de kilomètres de frontières qu’elle ne peut défendre seule en cas de conflit armé… »

La suite est connue. L’Algérie par Polisario interposé, a mis ses menaces à exécution. Mokhtar a été destitué et la Mauritanie durablement déstabilisée. Le Mali, un autre voisin de l’Algérie, pourra connaître les mêmes velléités de déstabilisation, s’il venait à contrarier la stratégie d’Alger dans la sous-région.

Mais tout laisse à penser que le ralliement des tribus de l’Azawad à ce grand regroupement des maures se fera, probablement, sans grande difficulté. Car la proximité géographique, les moyens financiers et militaires et les relations personnelles entre les autorités algériennes et les leadeurs de l’Azawad sont autant de facteurs qui peuvent faciliter la tâche.

Sans oublier que beaucoup de combattants du Polisario sont issus des tribus de l’Azawad.

Il faut rappeler à ce sujet, qu’Alger a abrité récemment plusieurs rounds de négociations entre les différents mouvements maliens. Ces pourparlers ont permis la signature des accords de paix de Bamako. Mais un point crucial, peu connu du grand public, mérite d’être souligné : les exactions et les crimes commis par les Maliens, notamment contre les Touaregs, ont créé une haine viscérale entre les deux parties, au point que beaucoup d’experts de la sous-région estiment que toute cohabitation pacifique entre ces deux parties est devenue très difficile, voire impossible.

Si cette stratégie présumée de l’Algérie porte ses fruits, elle aura d’importantes implications géopolitiques pour Alger :

  • L’Algérie sera plus que jamais perçue comme la locomotive du Maghreb ;
  • Cette nouvelle configuration géopolitique, lui permettra notamment l’exploitation des énormes gisements de fer de Grarat Jbeïlat avec les plus grandes réserves de fer au monde.

Parallèlement, avec une fenêtre sur l'Atlantique, elle pourra aussi construire des oléoducs et des gazoducs pour acheminer son pétrole et son gaz notamment vers le marché nord-américain ;

  • Le Maroc, son rival de toujours, sera isolé, encerclé…On se rappellera alors de la mise en garde prémonitoire du Sultan marocain Mansour Eddehbi. Ce monarque réunit un jour ses conseillers et leur tint ces propos : « Nous avons au Nord un ennemi héréditaire (l’Espagne), à l’Est, nous avons un autre ennemi, les Ottomans (en Algérie), à l’Ouest, nous avons la mer et nous n’avons pas de culture maritime, nous respirons par le Sud, notre profondeur stratégique ».

Outre toutes ces considérations géopolitiques, un point important mérite d’être mis davantage en exergue : Tous les experts sont unanimes pour dire que les réserves pétrolières actuelles de l’Algérie seront épuisées, au plus tard, dans une trentaine d’années.

Pour le moment, et malgré des campagnes soutenues de prospection, on n’a pas encore découvert de nouvelles réserves de pétrole et de gaz significatives en Algérie.

Cette situation est d’autant plus inquiétante que le prix du pétrole est en constante baisse. Plus inquiétant encore, les grands pays consommateurs de pétrole comme les Etats-Unis et certains pays européens trouvent déjà, sur place, chez eux, une nouvelle source d’énergie alternative avec l’exploitation des gaz de schiste.

Sans parler du développement ultra rapide des autres sources d’énergie de substitution au pétrole.

C’est dire que « l’après pétrole » pointe déjà à l’horizon. Pour faire face aux nombreux problèmes démographiques, économiques, sociaux qui les assaillent de tous les côtés, les gouvernants algériens sont à la recherche d’un substitut à l’or noir. Pour eux, ce substitut à l’or noir porte un nom : le fer de Grarat Jbeïlat dans la région de Tindouf avec les plus grandes réserves de fer au monde.

D’une teneur exceptionnelle (hématite/oxyde ferrique Fe203 de couleur rouge), ces fabuleux gisements n’ont pas pu être exploités jusqu’ici en raison de leur éloignement de la côte méditerranéenne algérienne. Un gigantesque trésor inexploité, faute de débouché.

En revanche, leur proximité des ports sahraouis (quelques 400 kms contre près de 2000 kms vers les ports algériens de la Méditerranée) et le relief particulièrement plat du Sahara sont autant de facteurs qui créent les conditions optimales d’une exploitation aisée et peu coûteuse.

Le sous-sol du Sahara algérien notamment dans la région de Tindouf recèle, par ailleurs, d’autres richesses minières très importantes. Mais ces minerais, une fois de plus, comme ceux de Grarat Jbeïlat se trouvent enclavés et très éloignés des ports algériens de la Méditerranée.

Avec tels enjeux géoéconomiques et géopolitiques on comprend mieux les raisons qui sous-tendent l’implication de l’Algérie dans l’affaire du Sahara. Et l’on comprend aussi les raisons qui la poussent à se doter d’un arsenal militaire sans rapport avec ses besoins réels de défense.

On entend souvent, ici ou là, que l’affaire du Sahara se réglera d’elle-même avec la disparition des dernières figures emblématiques du FLN/canal historique.

Il s’agit là de propos simplistes, distillés à dessein par certains milieux impuissants et résignés qui, pour se donner bonne conscience, recourent consciemment ou inconsciemment, à la politique de l’autruche.

Car les pères fondateurs de l’Algérie moderne et leurs compagnons de lutte sont soit morts, soit retirés de la vie publique en raison de leur âge avancé. Ceux qui restent aux affaires comme le président Bouteflika peuvent se compter sur les doigts d’une seule main.

La quasi-totalité de la classe politique algérienne actuelle à l’instar de Ouyahya Benflis, Hamrouche…jusqu’au premier ministre Sellal et les généraux de l’ANP n’appartiennent pas au FLN/Canal/historique.

On oublie que trois générations d’universitaires et d’officiers se sont succédé au pouvoir depuis de la création du FLN. Ces générations sont imprégnées du même esprit nationaliste que leurs aînés qui ont mené la lutte pour la libération nationale.

On leur a passé un flambeau qui doit être porté bien haut sur fond d’une ardente ferveur patriotique.

C’est dire qu’il serait puéril de croire qu’avec la disparition de Bouteflika, l’affaire du Sahara va se régler comme par enchantement. Seules une guerre civile ou une révolution islamique pourront contrarier, momentanément, la stratégie guerrière de l’Algérie dans la sous-région.

Au terme de ces développements, une mise au point s’impose. L’auteur de cette étude est bien conscient qu’il est difficile de prévoir l’avenir. Le scénario décrit plus haut sur la probable stratégie de l’Algérie, pourra se réaliser comme il peut, naturellement, ne pas se réaliser.

Ce travail est une analyse prospective faite sur la base de données concrètes et sur la base d’un faisceau d’indices prévisibles et concordants.

Compte tenu de tous les éléments de l’équation et compte tenu de ma modeste connaissance des acteurs et du terrain, je pense qu’il y a une forte probabilité pour que les choses se passent comme indiqué ci-dessus.

 

VII. Début des hostilités : le compte à rebours a-t-il déjà commencé ?

Ce chamboulement géopolitique annoncé, commencera, probablement, à prendre forme à l’horizon 2020.

Toutefois, des facteurs internes, à l’Algérie peuvent accélérer son déroulement :

  • L’incertitude qui pèse sur la succession de Bouteflika et l’absence d’un consensus politique, peuvent pousser à une surenchère entre les différents clans en lutte pour le pouvoir à Alger. Dans cette optique, une guerre avec le Maroc n’est pas exclue. Loin s’en faut.
  • Ce conflit armé avec le royaume chérifien, pourra aussi servir de prétexte pour bloquer la démocratisation en Algérie et en même temps conférer une « légitimité » à des militaires en quête d’un second souffle.
  • Pour les généraux algériens, une guerre avec le Maroc pourra, par ailleurs, occuper les esprits et servir d’antidote pour se prémunir, même temporairement, contre la lame de fond jihadiste qui peut déferler à tout moment.

Bref, quelque incertaine que soit la situation politique en Algérie, force est de reconnaître que les nuages de la discorde, des ressentiments et de la division s’amoncellent dans le ciel maghrébin.

On entend déjà, les sons encore lointains mais parfaitement audibles des bruits de bottes et des tambours de guerre.

Que faire alors ? Prendre les devants pour désamorcer une situation qui peut mettre à feu et à sang toute la sous-région. Comment ? Trouver une solution consensuelle à l’affaire du Sahara qui reste plus que jamais le détonateur qui peut mettre le feu aux poudres.

Dans cette optique, l’auteur de ces lignes a élaboré, aux fins utiles, une étude : « Esquisse d’un plan du règlement du conflit du Sahara » qui pourra être l’une des pistes à explorer.