Présidentielle 209 : Biram officialise sa candidature

28 March, 2019 - 01:04

Le président d’IRA-Mauritanie et député Biram Dah Abeid a officiellement déclaré, lundi 25 Mars, sa candidature à l’élection présidentielle du 16 juin prochain. C’est dans une salle archicomble de l’Institut Supérieur de la Jeunesse et des Sports (ISJS, ex-ancienne Maison des jeunes) que celui qui se définit comme le  « candidat national indépendant » à l’élection présidentielle s’est prononcé devant ses sympathisants et militants. Forte mobilisation, véritable démonstration de force. Un aéropage de personnalités politiques : Samba Thiam, du FPC ; Kane Hamidou Baba, du MPR ; Ba Alassane, du PMRC ; Ibrahima Sarr, de l’AJD ; Salah ould Hannena, de Hatem ; Samory ould Bèye, de Moustaqbel ; le candidat Sidi Mohamed ould Boubacar ; le président de Tawassoul, l’ancien ministre de l’intérieur et ex-chef d’état-major de l’Armée, le colonel Anne Amadou Babaly, des représentants d’OSC et bien

Sous les tonnerres d’applaudissements de ses militants, Biram a peint un tableau très sombre de la situation du pays, caractérisée par des « signes de banqueroute retentissante ». Dressant l’état des lieux, le leader abolitionniste constate : « après cinquante-neuf ans d'indépendance, notre devise parvient à la caricature de la faillite.  L'esprit et la lettre ne font plus sens, dans les pratiques de gouvernance, surtout depuis 1978 ». Et de relever cinq problèmes majeurs : En un, « la banalité sociale de la prévarication, sur fond de favoritisme tribal, ethnique et relationnel, consacrant la prévalence aigüe de la fraude et du faux. Les diplômes et les médicaments n’échappent pas au spectre de l’imposture que rien ne vient décourager.

[En deux], l’institutionnalisation du racisme, à tous les niveaux de l’autorité légale, assurant la prééminence multidimensionnelle d’une fraction, au détriment de la collectivité. L'épuration ethnique de 1989-91 constitue le point d’orgue de la régression. L’exclusion culturelle, l’assimilation sous la contrainte, la spoliation continuent de marquer le quotidien de certaines composantes de la communauté de destin. D’autres groupes endurent, à un niveau structurel, l’inégalité de naissance. La caste des descendants d’esclaves, en dépit de son poids démographique, cristallise, sans doute, l’échec le moins discret de la citoyenneté en Mauritanie.

[En trois], la permanence de la brutalité et de la contrefaçon, comme modes privilégiés d’exercice du pouvoir d’Etat, garantissant la solidarité irrationnelle, entre les adversaires de la mobilité et du changement. Il en résulte des indulgences, des avantages et des exonérations, reproductrices de prébende au service d’une minorité auto-cooptée qui esquive le suffrage et défie l’éthique.

[En quatre], l’injustice systémique, entretenant la criminalité en col blanc, concrètement traduite par le détournement des postures d’influence, source de jouissance matérielle et d’emprise sur l’opinion, avec des effets quasi irréversibles. Les banques, les sociétés minières, la pêche de gros tonnage, les dérogations fiscales, l’importation, le commerce des hydrocarbures, le négoce des signatures et jusqu’au échelons subalternes de l’administration répondent à la logique et aux finalités du pillage.

Et en cinq], la destruction des écosystèmes vitaux par qui l’humain normal envisage les conditions de sa continuité sur un espace, reflétant le stade ultime de la décomposition. Dépouillée de sa faune et de sa flore, la terre de Mauritanie se flétrit et devient stérile, à cause de politiques publiques où l’ignorance, la négligence et la fureur mercantile compromettent la possibilité d’un avenir ».

 

Redonner vigueur

Face à la déliquescence de l’Etat et à la détérioration des conditions de vie des populations confrontées à l’extrême pauvreté, Biram propose un remède de cheval. Son ambition ? « Redonner vigueur à la devise dévoyée de la République Islamique de Mauritanie : honneur-fraternité-justice ; une conférence nationale sur la cohésion, la justice transitionnelle, la vérité, la réparation et la mémoire s’attachera à clore le legs de l’impunité et de la préférence indue. Un pacte de la renaissance s’attèlera à réinventer un projet de vivre ensemble, sous l’égide de la loi. Il reposera sur un socle de droits universels, au-dessus de toute exception, fût-elle justifiée par l’histoire, la modération anesthésiante ou la religiosité. L’humanité des Mauritaniens et le caractère temporel de leur coexistence requièrent des ajustements, en vue de rompre le statu quo. Plus qu’une réforme diluée dans le piège du « laisser le temps au temps », il s’agit d’un saut en avant, d’une dynamique qualitative vers la modernité ».

Le candidat Biram compte «éradiquer l’oppression reçue en héritage. […] cette  résolution implique une répartition des responsabilités et primes selon le mérite mais appelle, aussi, des mesures urgentes de rattrapage, au bénéfice exclusif des victimes par vocation. Scolariser dans des écoles d’excellence, former aux métiers pourvoyeurs de valeur ajoutée, redistribuer les terres, subventionner l’innovation, réhabiliter les langues et cultures reléguées, reconnaitre et célébrer les souffrances de toutes les catégories de victimes, surtout celles des noirs d’ascendance subsaharienne, voici le minimum, quand arrive le moment de régler les mécomptes de l’histoire ».

 

Audit scrupuleux des ressources

Par ailleurs, Biram Dah Abeïd compte procéder à « un audit scrupuleux des ressources du pays et des avoirs de l’Etat, avant d’instaurer l’obligation, aux hauts fonctionnaires, de déclarer leurs biens, sur injonction du juge ou d’un quart de la délégation parlementaire, autant de fois qu’il le faudrait ».  « Compte tenu du degré de déconfiture morale et de la propension ambiante à l’échange de complaisances », il y a lieu, de l’avis du dirigeant abolitionniste, «  d’associer, aux mesures de salubrité, la compétence d’étrangers connus, pour leur crédit dans le domaine de la transparence ».

Il projette de  refonder l’école, adapter la quête de savoir aux besoins de l’existence terrestre. « Contre la fabrique de chômage et de qualifications dont l’utilité sociale interroge le discernement, il importe », fait remarquer Biram, « de favoriser l’enseignement qui ouvre au monde, épanouit et offre l’opportunité d’exceller, au sein d’un monde hyper-compétitif. La mission commence par l’abrogation du financement accordé aux entités vectrices d’extrémisme et de frustration. Il se poursuit en ambitieux programmes de resocialisation de la jeunesse, avec l’acquisition d’aptitudes manuelles, l’éducation à la diversité anthropologique du pays et l’éveil aux arts et sports. La femme n’est pas inférieure à l’homme : que la chose soit entendue, pour de bon ! »

 

Oser un compromis raisonnable

Pour le candidat Biram, il importe de se résoudre, en vertu de l’évaluation globale, à restaurer la planification économique, pour échapper aux servitudes de l’improvisation et du bricolage. «  L’effort constant se portera », annonce-t-il, « sur la formation du personnel enseignant, la construction de salles de classes et de centres de santé en proportion du rythme des naissances, la vulgarisation des énergies renouvelables, l’érection des infrastructures de base et la promotion du logement modique. Il convient de réaffirmer, ici, la tolérance zéro à l’endroit des braconniers, des fauteurs de désertification et des pollueurs du sous-sol. De même, l’élevage et l’agriculture ne sauraient produire de la richesse sur le long terme, tant que l’écologie restera étrangère à l’entendement des élites ».

Il va falloir « oser un compromis raisonnable », entre le peuple et ses défenseurs en armes, un pacte définitif qui fixe les limites à l’intrusion de la force légitime dans la conduite de la politique. « Le militaire, garant de la souveraineté et de l’intégrité du territoire, ne se déploie qu’au titre de ses subordination et loyauté à la représentation démocratique. La Mauritanie ne deviendra une république décente qu’après avoir mis un terme à la confusion, fatale, entre le prétorien et l’élu. Si le premier se soumet au second, alors, oui, « honneur-fraternité-justice » signifierait, enfin, le meilleur auquel pensaient les pionniers de l’Indépendance. Cinquante-neuf ans et nous revoici mis en demeure, de nous libérer de la domination intérieure, nous libérer des nôtres ! C’est mon dessein pour la Mauritanie ! » résume-t-il.

Compte rendu THIAM Mamadou